prit_, XI, 6, alinea 7.)]
Enfin, au bas degre, il y a tout le monde. Le peuple doit obeir, mais
non pas etre tout passif. Incapable de "conduire une affaire, de
connaitre les lieux, les occasions, les moments, d'en profiter", en un
mot incapable de gouverner[59], il est essentiel pourtant qu'on sache
ce qu'il desire et surtout ce dont il souffre, parce qu'au bout de ses
souffrances il y a la revolte qui ruine les lois, ou l'inertie et la
desesperance qui distendent et brisent les muscles memes de l'Etat. Le
peuple aura donc ses representants, qu'il choisira tres bien, car "il
est admirable pour cela", qui interviendront dans la direction generale
des affaires publiques. Il aura meme sa part dans le pouvoir judiciaire,
non pas en ce qui regarde le depot des lois, mais en ce qui concerne
la distribution de la justice. Des jurys, de pouvoirs essentiellement
temporaires, seront tires du corps du peuple, charges d'appliquer la
loi, sans avoir droit ni de l'interpreter ni de s'y soustraire, jugeant
non en equite, mais sur le texte[60].
[Note 59: II, 2.]
[Note 60: XI, 6.]
--Voila la royaute, les institutions aristocratiques, et les
institutions democratiques mises en presence.
Et comment tout cela s'organisera-t-il?--Trois puissances: executive,
legislative, judiciaire.
Le legislateur fait la loi, le prince gouverne en s'y conformant,
le magistrat en a le depot, et juge d'apres elle. Ces pouvoirs sont
scrupuleusement separes. Le legislateur ne jugera pas; car, alors, il
ferait des lois en vue des jugements qu'il voudrait porter. Une loi
serait dirigee a l'avance contre un homme qu'on voudrait proscrire. Plus
de liberte.
Le legislateur ne gouvernera pas, car alors il ferait des lois en vue
des ordres qu'il voudrait donner. Une loi serait la preparation d'un
caprice. Plus de liberte.
Le pouvoir executif ne legiferera point; car il aurait les memes
tentations que tout a l'heure le legislateur. Il ne jugera point; car
il jugerait pour gouverner. Ses arrets seraient des services, qu'il se
rendrait. Plus de liberte.--Il ne nommera meme pas les juges, car
il ferait des juges des instruments, et de la justice un systeme de
recompenses ou de vengeances personnelles. Plus de liberte.
Chacun doit faire un office qu'il n'ait aucun interet a faire, si ce
n'est honneur, et souci du bien general. La liberte c'est chaque pouvoir
public s'exercant, sans profit pour lui, au profit de tous.--L'execution
doit etre prompte: le
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