ent que tu y ailles; nous nous verrons tous les jours.
BERNARD
--J'en suis bien aise aussi; nous ferons les devoirs probablement.
FRANCOIS
--Je ne crois pas; quel age as-tu?
BERNARD
--Moi, j'ai huit ans.
FRANCOIS
--Et moi dix ans.
BERNARD
--Dix ans! Comme tu es petit!
Francois baissa la tete, rougit et se tut. Peu de temps apres qu'on fut
sorti de table, on vint annoncer a Christine que sa bonne venait la
chercher pour la ramener a la maison. Christine lui fit demander si elle
pouvait rester encore un quart d'heure, pour emporter sa poupee vetue de
la robe que lui faisait Gabrielle; mais, habituee a la severite de sa
bonne, elle se disposa a partir et a dire adieu a sa tante et a son
oncle.
GABRIELLE
--Attends un peu, Christine; je vais finir la robe dans dix minutes.
CHRISTINE
--Je ne peux pas; ma bonne attend.
GABRIELLE
--Qu'est-ce que ca fait? elle attendra un peu.
CHRISTINE
--Mais maman me gronderait et ne me laisserait plus venir.
GABRIELLE
--Ta maman ne le saura pas.
CHRISTINE
--Oh oui! ma bonne lui dit tout.
La tete de la bonne apparut a la porte.
--Allons donc, Christine, depechez-vous!
CHRISTINE
--Me voici, ma bonne, me voici!
Christine courut a sa tante pour dire adieu. Francois et Bernard
voulurent l'embrasser; ils n'eurent pas le temps; la bonne entra dans le
salon.
LA BONNE
--Christine, vous ne voulez donc pas venir? Il est tard; votre maman ne
sera pas contente.
CHRISTINE
Me voici, ma bonne, me voici!
GABRIELLE
Et ta poupee? tu la laisses?
--Je n'ai pas le temps, repondit tout bas Christine effaree; finis la
robe, je t'en prie; tu me la donneras quand je reviendrai.
La bonne prit le bras de Christine, et, sans lui donner le temps
d'embrasser Gabrielle, elle l'emmena hors du salon. La pauvre Christine
tremblait; elle craignait beaucoup sa bonne, qui etait injuste et
mechante. La bonne la poussa dans la carriole qui venait la chercher, y
monta elle-meme; la carriole partit.
--Christine pleurait tout bas; la bonne la grondait, la menacait en
allemand, car elle etait Allemande.
LA BONNE
--Je dirai a votre maman que vous avez ete mechante; vous allez voir
comme je vous ferai gronder.
CHRISTINE
--Je vous assure, ma bonne, que je suis venue tout de suite. Je vous en
prie, ne dites pas a maman que j'ai ete mechante; je n'ai pas voulu vous
desobeir, je vous assure.
LA BONNE
--Je le dirai, mademoiselle, et,
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