! Vous etes toujours en querelle avec
quelqu'un, Mina.
MINA
--Madame pense pourtant bien que je ne peux laisser Christine sans
dejeuner.
MADAME DES ORMES
--Je le sais, mais vous pourriez arranger les choses entre vous, sans
m'obliger a m'en meler. Que voulez-vous que je fasse a present? Que je
fasse venir cet homme, que je le gronde! Quel ennui, mon Dieu, quel
ennui! Allez chercher mon mari; dites-lui que j'ai a lui parler.
MINA
--Si madame prefere, j'irai chercher le chef.
MADAME DES ORMES
--Mais non; c'est precisement ce qui m'ennuie.
MINA
--Si madame voulait lui donner un ordre par ecrit, ce serait mieux que
de deranger monsieur.
MADAME DES ORMES
--Quelles sottes idees vous avez, Mina! Que j'aille ecrire a mon
cuisinier, quand je peux lui parler! Allez me chercher mon mari.
MINA
--Mais, madame...
MADAME DES ORMES
--Taisez-vous, je ne veux plus rien entendre: allez me chercher mon
mari.
Mina sortit, mais se garda bien d'executer l'ordre de sa maitresse;
irritee des retards qu'eprouvait sa toilette pour la noce, elle
se promit de se revenger sur la pauvre Christine, seule cause,
pensait-elle, de ces ennuis.
"Ou est-elle cette petite sotte? Je ne l'ai pas vue depuis ce matin".
Elle alla a sa recherche; ne l'ayant pas trouvee dans le jardin, elle
rentra de plus en plus mecontente et finit par trouver Christine dans le
salon, prenant une lecon d'ecriture avec Paolo.
--Qu'est-ce que vous faites ici, Christine? Rentrez vite dans votre
chambre! lui dit-elle rudement.
Christine allait se lever pour obeir a sa bonne, dont elle redoutait la
colere, lorsque Paolo, la faisant rasseoir:
--Pardon, signorina, restez la; nous n'avons pas fini nos lecons.
Et vous, dona Furiosa, tournez votre face et laissez tranquille la
signorina.
--Laissez-moi tranquille vous-meme, grand Italien, pique-assiette; je
veux emmener cette petite sotte, qui n'a pas besoin de vos lecons, et je
l'aurai malgre vous.
Paolo saisit Christine, l'enleva et la placa derriere lui; Mina
s'elancant sur lui, recut un coup de poing qui lui aplatit le nez, mais
qui redoubla sa fureur et ses forces; d'un revers de bras elle repoussa
Paolo et attrapa Christine, qu'elle tira a elle avec violence.
"Si vous appelez, je vous fouette au sang!" s'ecria-t-elle, tirant
toujours Christine que retenait Paolo.
Au moment ou Paolo, craignant de blesser la pauvre enfant, l'abandonnait
a l'ennemi commun, Mina poussa un cri
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