, monsieur, d'apres ce que m'avait dit Mme des
Ormes, en venant de suite pres de mademoiselle; mais du moment que ma
presence ici vous deplait, je me retire; vous me permettrez seulement de
rassembler mes effets que j'avais ranges dans l'armoire.
L'air digne, le ton poli d'Isabelle frapperent M. des Ormes, qui se
sentit un peu embarrasse et qui dit avec quelque hesitation:
--Certainement! prenez le temps necessaire; je ne veux rien faire qui
puisse vous desobliger; vous coucherez ici si vous voulez.
ISABELLE
--Merci, monsieur, je prefere m'en retourner chez moi. Adieu donc, ma
pauvre Christine; je vous regrette bien sincerement, soyez-en certaine.
Christine pleurait a chaudes larmes en embrassant Isabelle. M. des Ormes
regardait d'un air etonne l'attendrissement de la bonne et les larmes de
Christine, qui s'ecria dans son chagrin:
--Dites a mon bon Francois que je voudrais etre morte; je serais bien
plus heureuse.
M. DES ORMES
--Ah ca! Christine, tu perds la tete. Quelle sottise de te mettre a
pleurer parce que je ne garde pas une bonne que je ne connais pas, que
personne ne connait et qui est ici depuis quelques instants, je pense!
Christine voulut repondre, mais elle ne put prononcer une parole.
Isabelle ramassa promptement le peu d'effets qu'elle avait sortis de sa
malle, embrassa une derniere fois Christine, et se disposa a partir en
disant:
--J'enverrai demain chercher la malle, monsieur; vous permettrez
peut-etre que je la laisse ici; mais si elle vous gene, je demanderai a
M. de Nance de vouloir bien l'envoyer chercher de suite.
M. DES ORMES
--M. de Nance! vous le connaissez!
ISABELLE
--Oui, monsieur; je viens de chez lui.
M. DES ORMES
--Comment, vous seriez...? Mais ne vous a-t-il pas donne une lettre pour
moi?
ISABELLE
--Non. monsieur; j'en avais une pour madame qui m'a arretee de suite;
mais je vous assure que je regrette bien de m'etre presentee; si j'avais
prevu ce qui arrive, je m'en serais bien gardee.
M. DES ORMES
--Mon Dieu! mais... j'ignorais que vous fussiez la personne que devait
envoyer M, de Nance; je ne savais pas que vous eussiez vu ma femme;
restez, je vous en prie, restez.
ISABELLE
--Non, monsieur; il pourrait m'arriver d'autres desagrements du meme
genre et je ne veux pas m'y exposer; habituee a etre traitee par M.
de Nance avec politesse et meme avec affection, un langage rude, une
mefiance injurieuse me blessent et me chagrinent. Adieu une
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