ue en vous trouvant a la
bibliotheque et en vous voyant etudier les proces de Strasbourg et de
Boulogne que je venais moi-meme lire. Il m'a paru qu'il y avait dans
cette rencontre quelque chose qui ne tenait point au seul hasard, et que
si tous deux en meme temps nous nous occupions du meme sujet, c'etait
que tres-probablement nous avions les memes raisons pour le faire. Je
vais vous dire quelles sont les miennes, et si vous le trouvez bon, vous
me direz apres quelles sont les votres. Mais ce n'est pas un marche que
je vous propose et je ne vous dis pas: confidence pour confidence. Bien
entendu, vous restez maitre de votre secret.
Que voulait-il? M'entrainer dans une conspiration? Cela n'etait guere
probable, etant donne son caractere honnete et droit. Mais alors, s'il
ne s'agissait pas de complot, que signifiaient ces precautions de
langage? Il ne pouvait pas avoir les memes raisons que moi pour vouloir
connaitre le commandant de Solignac. J'avoue que ma curiosite etait
vivement excitee.
--Mon secret est bien simple, dis-je.
--Je vous en felicite et je voudrais que la mien fut comme le votre,
mais il ne l'est pas et voila pourquoi je persiste dans mon idee de m'en
ouvrir a vous, afin que nous tenions a nous deux une sorte de petit
conseil de guerre. Tout d'abord j'avais cru que ce secret serait le
meme pour nous deux et alors nous aurions eu l'un et l'autre les memes
raisons pour prendre une resolution. Mais bien que par le peu de mots
que vous venez de dire, je vois que vous n'etes pas dans une situation
identique a la mienne, je n'en veux pas moins vous consulter.
Ici, il me dit de nouveau mille choses obligeantes que je ne veux pas
rapporter, mais que je dois constater cependant pour expliquer la
confiance qu'il me temoignait.
A la fin, toutes ses precautions oratoires etant prises, il abandonna le
langage obscur et entortille dont il s'etait jusque-la servi pour parler
plus clairement:
--Si on venait vous tater, me dit-il, pour savoir de quel cote vous vous
rangeriez dans le cas d'un conflit entre le president de la Republique
et l'Assemblee, quelle serait votre reponse?
--Elle serait simple et nette; je me rangerais du cote de celui qui
respecterait la loi et contre celui qui la violerait. Nous n'avons pas
autre chose a faire, nous autres soldats; notre route est tracee, nous
n'avons qu'a la suivre: c'est tres-facile.
--Pour ceux qui voient cette route, mais tout le monde ne la voit pas
comme vou
|