e, mais pour peu
de temps, car bientot encore il donne sa demission.
J'en etais la de mon etude quand je m'entendis appeler par mon nom.
C'etait Vimard, le capitaine d'etat-major que tu as du connaitre quand
il etait a Oran; il s'etait assis en face de moi sans que je le visse
entrer.
--On me dit que vous avez le volume de l'_Histoire de dix ans_ ou
se trouve le proces de Strasbourg; si vous ne vous en servez pas,
voulez-vous me le preter?
Je le lui tendis et me remis a ma lecture. Decidement le bibliothecaire
ne m'avait pas trompe, ce proces etait a la mode.
Jusqu'au moment de la fermeture de la bibliotheque, nous restames en
face l'un de l'autre, lisant tous deux et ne nous parlant pas.
Mais en sortant Vimard me prit par le bras et cela me surprit jusqu'a
un certain point, car si nous sommes bien ensemble, nous ne sommes pas
cependant sur le pied de l'intimite.
--Etes-vous presse de rentrer? me dit-il.
--Nullement.
--Alors, voulez-vous que nous allions jusqu'au Prado?
--Et quoi faire au Prado?
--Causer.
--Il s'agit donc d'un complot?
--Pouvez-vous me dire cela, a moi surtout!
--Vous cherchez le silence et le mystere.
--C'est qu'il s'agit d'une chose serieuse que je veux examiner avec
vous, sans qu'on nous ecoute et nous derange.
--Allons, donc au Prado.
XI
De la bibliotheque au Prado la distance est assez longue; pendant le
temps que nous mimes a la franchir par le cours Julien et le cours
Lieutaud, Vimard garda un silence obstine, qui me laissa toute liberte
pour reflechir a sa demande d'entretien.
Pourquoi cet entretien?
Pourquoi ce mystere?
Pourquoi nous etions-nous rencontres a la bibliotheque consultant l'un
et l'autre l'histoire des conspirations du prince Louis?
Enfin, en arrivant au Prado, qui se trouvait a peu pres desert, Vimard
se decida a parler.
--Mon silence vous surprend, n'est-ce pas?
--Beaucoup.
--C'est que je ne desire pas que ce que j'ai a vous dire soit entendu,
et quand je suis sous l'impression d'une forte preoccupation, je ne peux
pas parler pour ne rien dire.
--Maintenant, je serai seul a vous entendre.
--J'aborde donc le sujet qui nous amene ici; et si je le fais
franchement, c'est parce que j'ai en vous toute confiance.
Il ajouta encore quelques paroles qu'il est inutile de rapporter, et
apres que je l'eus remercie comme je le devais de la sympathie qu'il me
temoignait, il continua:
--L'idee de m'ouvrir a vous m'est ven
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