ent ruine, et les bas-reliefs, ainsi que les gracieuses
statuettes de femmes assises qui supportent la vasque superieure, sont
ornes d'une telle croute de crasse, de boue et de sable, qu'on a peine a
en distinguer les contours et la forme.
Elle fut edifiee en 1547 par Fra Giovanni d'Angelo. La place est assez
belle, du reste, et ornee de deux statues: l'une en bronze, representant
Charles II a cheval, et l'autre le bon roi Ferdinand. Le Corso et la
strada Ferdinanda sont les promenades favorites des habitants. Il y a
des quantites de palais, mais ils sentent la misere a dix lieues a la
ronde. A part quelques exceptions, lorsque l'oeil vient a plonger dans
ces somptueuses habitations, on reste epouvante de ce qu'on apercoit a
l'interieur. Une haute chaine de montagnes, appelee monts Pelore,
entoure la ville et va aboutir au Faro.
Depuis le debarquement de Garibaldi a Marsala, les habitants de Messine,
quoique non moins exaltes que ceux de Palerme, paraissaient frappes de
stupeur. Plus les troupes royales arrivaient en ville, venant de
Palerme, Trapani, Girgenti, etc., enfin de partout excepte de Syracuse,
et plus on s'empressait de fermer les magasins, d'emballer les
marchandises et de les cacher partout ou faire se pouvait. On se
rememorait avec crainte les horreurs du premier bombardement et on en
prevoyait un second pire encore et presque inevitable.
La citadelle et les forts entassaient effectivement canons sur canons,
percaient meurtrieres sur meurtrieres, blindaient leurs embrasures et
couvraient leurs parapets de sacs a terre.
Pres de trente mille hommes defendaient ces ouvrages et formaient autour
de Messine, sur tous les points dominants des monts Pelore, une suite de
postes d'observation dont le telegraphe et le monte Barracone etaient le
centre et la base de defense.
Toujours en alerte, toujours sur pied et toujours en tenue de campagne,
ces troupes paraissaient decidees et devouees. Le general Clary, qui
commandait en chef, avait l'ordre formel de n'abandonner aucun des
points utiles a la defense. On devait donc croire que les colonnes
liberales rencontreraient une resistance desesperee. Or les habitants de
Messine, en prevision de ces evenements, avaient quelques raisons de
s'alarmer. Si les soldats royaux paraissaient vouloir defendre leur
drapeau un peu mieux qu'a Palerme, on pouvait etre certain que la plus
grande partie se hateraient aussi de profiter des moments favorables
pour renouveler les
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