de la fusillade et de la mitraillade, faire une fugue
sur le champ de bataille, secouant ses oreilles et lancant des ruades
dans toutes les directions. Ce brave animal, dont les elans de gaiete
defiaient les balles et les biscaiens qui pleuvaient autour de lui,
apres avoir use sa premiere ardeur, se mit tranquillement a brouter puis
a suivre et regarder curieusement les parlementaires qui se succederent
apres l'affaire. Mais il s'obstina, malheureusement pour lui, a vouloir
bivouaquer sur le theatre de ses lauriers et, dans la nuit, il fut
victime d'une seconde fusillade qui s'engagea vers les deux heures du
matin.
Le lendemain, les Napolitains plierent leurs tentes, demolirent un grand
batiment en planches qui leur servait de magasin, firent rentrer leur
grand'garde et reculerent leur ligne de vedettes jusqu'au milieu de
Terranova, ce qui n'empecha pas la meme comedie de se renouveler
presque chaque jour avec une mise en scene analogue.
Cependant le temps passait, et a chaque nouveau soleil on se demandait:
"Mais ou est donc le Dictateur?" Mille bruits et mille versions
circulaient. Le general Garibaldi etait alle, disait-on, tout simplement
a Naples. D'autres le faisaient prendre terre a Salerne avec une armee
de volontaires piemontais. L'affaire se compliquait. On se mit alors a
ruminer les faits passes.
Presque toute la marine a vapeur est absente. Qui sait ou elle est?
Personne. On attendait de Palerme deux nouveaux bateaux a vapeur. Ou
sont-ils? Tout le monde l'ignore. Beaucoup de nouveaux corps de
volontaires avaient ete concentres a Milazzo. Que sont-ils devenus?
Parbleu! voila l'histoire: les vapeurs ont embarque les troupes sans
tambours ni musiques; ils sont partis de meme, ont attendu au large de
Salerne le navire de Garibaldi et on est debarque.--Chacun repete en
ville cette petite historiette et on unit par y croire. Deux jours se
passent. On attend toujours avec anxiete l'arrivee d'un navire
quelconque qui va, certainement, apporter des nouvelles officielles du
debarquement a Salerne et de la marche en avant de l'armee independante.
Espoir decu! Rien ne parait et tout le monde de repeter: Anne, ma soeur
Anne, ne vois-tu rien venir?
Mais voila bien une autre histoire. Un petit bateau calabrais annonce a
son de trompe a qui veut l'entendre que l'on est alle jusque dans le
porte de guerre napolitain de Castellamare, pres de Naples, attaquer un
vaisseau, le _Monarc_, en cours d'armement. Evidemment,
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