a un tel air de
mauvaise humeur que Belzebuth en prendrait les armes. Heureusement les
citadins messinois, presque completement rassures sur les horreurs d'un
bombardement, ne s'effarouchent plus aussi vite et ne craignent meme pas
de regarder en face la citadelle en affirmant d'un grand air de dedain
que si tot ou tard cette bicoque ne veut pas amener son pavillon, on
saura bien, ventre-saint-gris! l'y contraindre. Alors, impitoyablement
demolie et rasee, on en labourera le sol, on y semera du sel, enfin on
en fera une superbe promenade ou le sable regnera en maitre absolu; ce
qui fait qu'a l'avenir, la ville sera certaine de ne plus encourir de
chatiments aussi severes que ceux de 1848.
Les rues de la ville, desertes de soldats nationaux, ont retrouve leur
aspect bourgeois d'autrefois. A peine si quelques gardes civiques s'y
promenent a l'aise, en compagnie de leurs fusils.
A Milazzo, tout a repris son cours normal; mais tous les matins et tous
les soirs, on voit de nombreux oiseaux de proie planer et s'abattre en
battant de l'aile sur un point quelconque des roseaux qui avoisinent
l'entree de l'isthme. Dans l'interieur de l'ile, une grande partie de la
population s'imagine toujours que la liberte, c'est le droit pour chacun
de faire ce qui lui plait, de prendre ce que bon lui semble. Exemple les
evenements de Bronte; aussi tout va-t-il pas mal de travers, et le
besoin de gendarmes se fait-il generalement sentir.
Les bandes d'honnetes bandits qui courent les montagnes rendent les
communications assez peu sures, et les pancartes votant pour
Victor-Emmanuel sont a l'ordre du jour, pourvu toutefois que le roi
_galantuomo_ agisse comme la liberte, en laissant faire ce qu'on veut. A
cette condition, tous les Siciliens consentiront a etre Piemontais,
c'est-a-dire Italiens, car encore veulent-ils rester Siciliens, avoir,
avant tout, leur petit gouvernement a part, leur petit senat, leurs
petits ministres. Ils tiendraient moins a avoir une petite armee.
Somme toute, Palerme a completement fait disparaitre ses barricades;
comme Messine, elle a quitte son air guerrier; plus heureuse que sa
rivale, aucune citadelle ne l'empeche de dormir. Si Alexandre Dumas
n'habite plus le palais, il y a a sa place presque un vice-roi. La
garnison piemontaise, assez peu choyee, a ete casernee aux Quatro-Venti,
ou le grand air lui est plus sain que celui de la ville.
A Alcamo, une croix a ete elevee sur les victimes de la guerre. A
Cal
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