it les habitants a reintegrer leurs
demeures, les assurant qu'un arrangement etait conclu et qu'ils
pouvaient, sans aucun danger, boire, manger, dormir et se promener de
par la ville avec tous les drapeaux et les vivat possibles.
Cependant, le mouvement s'opera lentement. On ne paraissait pas avoir
grande confiance dans la bonne foi de cet armistice. Une seconde
proclamation, annoncant l'approche de Medici et son entree dans la ville
pour le lendemain, eut un peu plus de succes. On vit quelques matelas
franchir timidement les portes de Messine.
Le 27, au matin, le general Medici, avec sa division, qu'une
proclamation du Dictateur avait porte, le jour meme de la bataille de
Milazzo, a l'ordre du jour de l'armee, faisait son entree dans la ville
et l'on attendait le general Garibaldi dans l'apres-midi.
Tout le monde etait d'accord, tout le monde s'embrassait. Chacun courait
par la ville a ses petites affaires. Les soldats napolitains trottaient
gravement par les rues pour acheter leur macaroni. Leurs officiers
regardaient et flanaient. Les volontaires ne manquaient pas d'envie d'en
faire autant et, aussitot que faire se put, les fusils en faisceaux et
les sacs a terre, ils s'en furent de leur cote, lorgnant aux balcons,
clignant de l'oeil aux ruelles et frayant sans rancune avec la
soldatesque napolitaine dont les figures, epanouies par la certitude
d'une bataille evitee, respiraient le bonheur de se sentir vivre et de
reprendre bientot la route de Naples.
Dans l'apres-midi, Garibaldi fit son entree, aux applaudissements
frenetiques de tout le monde; quelques drapeaux commencerent a se
montrer avec froideur. On semblait, dans la ville, avoir beaucoup de
peine a s'habituer a l'idee d'etre piemontise a perpetuite et, certes, a
ce moment, le roi galant homme n'aurait eu qu'une mesquine ovation.
Presque aussitot entre a Messine, le Dictateur monta en voiture et se
rendit au Faro, a l'entree du detroit, en passant par le Ringo, le
Paradis, la Grotta, etc. Cette course ne fut qu'un immense triomphe, un
cri de _Viva Garibaldi!_ depuis la sortie de la ville jusqu'a l'extreme
pointe du Faro; et, cependant, il traversait la malheureuse population
sur laquelle les souffrances et les privations pesaient depuis quelques
jours. Quant a _il Re galantuomo_, il n'en fut pas plus question que de
l'empereur de la Chine, malgre l'air conquerant des officiers piemontais
qui accompagnaient le Dictateur. Quand celui-ci rentra en ville,
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