ix plus douce que la
sienne lorsqu'il lui parlait, ce qu'il faisait depuis le moment ou il
arrivait jusqu'au moment ou il partait.
Fatiguee d'attendre, impatiente, inquiete, pressee par toutes sortes de
raisons, madame de Barizel se decida enfin a faire une tentative directe
sur Savine, de facon a l'obliger a se prononcer ou tout au moins a
montrer quels etaient ses vrais sentiments pour Corysandre, jusqu'ou ils
allaient et ce qu'on pouvait en attendre.
Lorsqu'elle se fut arretee a cette idee, elle n'en differa pas
l'execution, si serieuse qu'elle fut.
Savine devait venir dans la journee; elle s'arrangea pour etre seule
au moment de son arrivee et aussi pour n'etre point derangee tant que
durerait leur entretien.
Bien qu'elle fut encore assez jeune pour inspirer des passions, elle
etait cependant dans la classe des meres, de sorte que ceux qui venaient
pour voir Corysandre et qui, au lieu de trouver la fille, ne trouvaient
que la mere, se laissaient aller bien souvent a un mouvement de
deception.
--Mademoiselle Corysandre? demanda Savine apres les premiers mots de
politesse.
--Elle est dans sa chambre, ou elle restera, car j'ai a vous entretenir
en particulier de choses graves.
En particulier! Des choses graves! Savine fut inquiet. L'heure qu'il
avait si souvent redoutee etait-elle sonnee? Allait-on lui demander a
quel but tendaient ses assiduites dans cette maison?
--Et notre entretien, continua madame de Barizel, doit rouler sur elle,
au moins incidemment, surtout sur l'un de vos amis.
D'amis, il n'en avait reellement qu'un: lui-meme; puisque ce n'etait pas
de lui qu'il allait etre question, il n'avait pas a prendre souci. Les
autres, ses amis, que lui importait?
Il s'installa commodement dans son fauteuil pour subir le supplice qu'on
allait lui imposer, se disant tout bas qu'on etait vraiment bien bete de
s'exposer a ce que des gens pussent pretendre qu'ils etaient vos amis.
--Vous connaissez beaucoup M. le duc de Naurouse? commenca madame de
Barizel.
--Comment, si je le connais; c'est mon meilleur ami; nous sommes lies
depuis plusieurs annees. C'est lui qui m'a assiste dans mon duel avec
le duc d'Arcala, ce duel stupide ou j'ai eu la sottise, par pure
generosite, de me faire donner un coup d'epee par un adversaire moins
naif que moi, au moment meme ou je cherchais a le menager.
C'etait la un souvenir que Savine aimait a rappeler au moins en ces
termes, dont il etait satisfait.
--Alor
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