femmes d'une sante
mediocre ont des grossesses superbes. J'etonnai fort une malade, un
jour, en lui disant qu'elle ne devait aller bien que pendant ses
grossesses. C'est qu'elle avait de la ptose abdominale, et que la
grossesse devait lui produire l'effet d'une sangle, en soutenant les
organes. Mais il n'est guere vraisemblable qu'un etat de sante
aussi artificiel, et aussi transitoire, soit, pour le produit de la
conception, un brevet de sante future.
Par contre, les "maladies" de la mere pendant la grossesse ont une
influence bien connue sur la valeur de l'enfant a naitre. Quand elles ne
provoquent pas l'avortement, elles impriment a l'enfant une tare.
J'ai observe, a cet egard, un fait bien suggestif. Une jeune femme, au
quatrieme mois de sa premiere grossesse, avait eu une appendicite si
nettement caracterisee que le confrere qui devait l'accoucher, et
moi-meme, avions ete sur le point de provoquer l'intervention d'un
chirurgien. La malade avait pu, cependant, etre traitee medicalement:
mais l'enfant, ne a terme, a presente des sa naissance une intolerance
intestinale veritablement anormale. Une premiere nourrice, choisie par
l'accoucheur, lui a donne un lait qui a semble trop fort, car l'enfant a
eu, des le deuxieme jour, de la diarrhee verte et des vomissements. Dans
l'espace de quatre semaines, trois autres nourrices, toujours choisies
avec le plus grand soin, n'ont pas eu plus de succes: a chaque nouvelle
nourrice, vomissements, fievre ardente, diminution rapide du poids.
Mais, pendant qu'on cherchait a grand prix des nourrices ideales, on
etait bien oblige de donner a l'enfant du simple lait de vache coupe;
alors il allait mieux, la fievre tombait, le poids augmentait tres
vite, la vie revenait: de telle sorte que, apres ces quatre tentatives
d'allaitement par le lait de femme, l'accoucheur me dit: "Mais enfin,
pourquoi s'obstiner a trouver une nourrice? Cet enfant a probablement
un intestin extremement delicat, a cause de l'appendicite de sa mere
pendant la gestation; donnons-lui simplement du lait sterilise coupe!"
Et il eut raison; grace a d'infinies precautions, a une surveillance
methodique, l'enfant put etre eleve.
Il est bien clair qu'en rapportant ce fait je n'entends pas faire le
panegyrique de l'allaitement artificiel: je ne le cite que pour prouver
comment la "maladie" d'un organe de la mere pourrait bien avoir une
repercussion sur le fonctionnement du meme organe, chez l'enfant qu'elle
porte
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