emperature s'abaissait a 40 deg. le matin. Bien que la chaleur de la peau
fut mordicante, bien que la malade n'eut aucun interet a me tromper
puisque c'est de son plein gre qu'elle m'avait appele, je me refusai a
croire a la possibilite d'une fievre aussi ardente et aussi continue. Je
m'attachai a verifier et a faire verifier avec le plus grand soin les
indications thermometriques; elles etaient parfaitement exactes. C'est
alors que, en desespoir de cause, voyant que ni la quinine en injections
ni les lotions fraiches ne modifiaient cette temperature, je me decidai
a recourir aux lumieres du Dr Babinski, qui, apres examen, me dit: "Je
ne trouve pas, non plus, de tuberculose, il n'y a certainement pas
d'impaludisme; nous sommes donc en presence d'une de ces hyperthermies
comme on en rencontre chez les grandes hysteriques. Mais le plus presse
est d'empecher cette femme de mourir de faim, et, puisqu'elle ne peut
pas manger, il faut la suralimenter par la sonde." Ainsi fut fait; et,
apres cinq repas assez copieux donnes a la sonde, la malade retrouva
l'appetit, la fievre tomba, le sommeil revint. Deux mois apres, elle
pouvait quitter Paris, et, vingt-huit mois apres, je recevais une lettre
m'annoncant la naissance d'un enfant. Suivant la formule traditionnelle,
la mere et l'enfant se portaient bien.
Autre exemple. Quand j'etais au Val-de-Grace, le professeur Delorme
m'invita a voir l'un de ses malades, opere depuis dix jours, et qui,
depuis, ne voulait pas manger. Il etait gueri de son operation, n'avait
aucune fievre, aucune lesion organique, mais il se refusait obstinement
a avaler quoi que ce fut. C'etait probablement le choc operatoire qui
avait produit une folie passagere. Ce qu'il y a de certain, c'est qu'il
maigrissait a vue d'oeil. Je n'hesitai pas, alors, a lui donner du
premier coup, par la sonde, avec le plus de douceur et de bienveillance
possible, un repas complet; des le meme soir, il demandait a manger, et,
s'etant mis a digerer, il etait gueri. Huit jours apres, il sortait de
l'hopital en tres bon etat. Nul doute encore que, chez les alienes, il
ne soit du devoir strict du medecin de prolonger l'alimentation a la
sonde aussi longtemps qu'elle est necessaire, apres s'etre toutefois
bien enquis du fonctionnement du systeme digestif. Il y a la de grosses
difficultes cliniques.
D'une facon generale, cependant, nous hesitons toujours a employer ce
moyen brutal qu'est la sonde oesophagienne; le plus souvent, qua
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