Salpetriere, autrefois, une malade qui, des le debut du
siege de Paris, devint folle pour avoir vu eclater un obus a ses pieds.
On comprend donc qu'une serie d'emotions et de frayeurs arrive au meme
resultat. De la l'enorme proportion d'alienes observee apres le siege
de Paris; de la, la multiplicite des cas de psychonevrose, d'alienation
mentale, signales dans l'armee russe pendant le cours de la guerre
russo-japonaise. Jamais, depuis que les hommes s'entre-tuent, le systeme
nerveux des belligerants n'avait ete soumis a d'aussi dures epreuves.
Tous les facteurs morbides s'accumulaient, chez les Russes, pour
produire le desarroi du systeme nerveux. Eloignement de la patrie,
voyage prolonge en chemin de fer, alimentation insuffisante, manque
de confiance dans les chefs, menace incessante de surprise, surmenage
physique s'ajoutant au surmenage emotionnel; c'est plus qu'il n'en faut
pour rendre malade le malheureux soldat ou officier russe, pour peu
qu'il soit predispose par l'alcoolisme ou par l'heredite nerveuse. Mais
que faire contre un semblable etat de choses? L'homme sense ne peut que
deplorer l'inanite des efforts de tous les pacifistes.
Ces "maladies", consecutives au fleau qu'on appelle la guerre, ne sont
pas assez connues du monde extra-scientifique. On se figure volontiers
que, quand la guerre a pris fin, tout est fini. Il n'en est rien; c'est
pendant quinze et vingt ans que les nefastes effets d'une guerre se font
sentir. Pendant vingt ans, nous avons eu a soigner des officiers qui
avaient pris le germe de leurs "maladies" pendant la campagne de 1870,
et surtout pendant la captivite.
Dans un cadre plus restreint, nous voyons tous les jours l'influence du
choc chirurgical sur la genese de la nevrose. On commence a connaitre
les psycho-nevroses consecutives aux grandes operations: mais c'est un
point sur lequel il convient d'attirer l'attention, pour moderer le zele
chirurgical des operateurs. Ils doivent savoir que, quand l'operation
est finie et bien finie, tout n'est pas termine, et que le patient,
sorti gueri de leurs mains, est quelquefois "un malade" qui restera tel
pendant plusieurs annees. Le choc traumatique produit par l'intervention
chirurgicale suffit pour expliquer ces accidents tardifs.
J'ai, pendant longtemps, donne des soins a une dame qui, d'une tres
belle sante jusqu'a trente-huit ans, est devenue grande nerveuse, avec
anorexie, amaigrissement, etc., immediatement apres une operation de
tu
|