meur benigne du sein. Depuis lors, elle est sans cesse preoccupee de
la recidive possible d'une tumeur du sein, et sa vie est empoisonnee par
des malaises de tout genre qu'elle n'avait pas avant l'operation.
Il faut aussi savoir qu'une intervention chirurgicale, meme de moindre
importance encore, d'importance ultra-minime, peut mettre le systeme
nerveux dans un etat d'ebranlement durable: c'est quand elle occasionne
une violente douleur. La douleur provoque une fuite nerveuse enorme.
Ainsi je connais une jeune fille, de bonne sante anterieure, qui est
devenue neurasthenique immediatement apres des operations sur les dents.
Inutile de dire que, quand les interventions chirurgicales sont
pratiquees sur des personnes dont le systeme nerveux est deja ebranle
plus ou moins, elles deviennent une cause d'aggravation notable.
La seule crainte de l'operation possible suffit pour provoquer une
aggravation de la nevrose. Est-il un medecin qui n'ait pas vu accourir
chez lui, forcant sa porte, une cliente, affolee parce qu'elle a
constate sur elle, ou cru constater, une tumeur du sein? Et c'est bien
autre chose encore quand le diagnostic est douteux, quand la malade
va de chirurgien en chirurgien pour obtenir un avis ferme; jusqu'a ce
qu'elle soit fixee sur son sort, elle est dans un etat d'anxiete que ne
connaissent peut-etre pas assez les chirurgiens, et qui devrait leur
dicter leur conduite non pas seulement au point de vue operatoire, mais
au point de vue psychique.
Personne plus que moi n'admire les chirurgiens. Leur sang-froid, leur
maitrise d'eux-memes, leur habilete manuelle m'etonnent; les merveilleux
resultats qu'ils obtiennent le plus souvent me font les considerer, au
total, comme de vrais bienfaiteurs de l'humanite. Aussi ai-je l'espoir
qu'ils ne m'en voudront pas si je me permets de faire remarquer que,
a cote de beaucoup de bien, ils font un peu de mal, et un mal qu'ils
pourraient ne pas faire s'ils connaissaient mieux les repercussions
qu'ont, sur le systeme nerveux, leur intervention, et aussi les soins
qu'ils donnent a leur malade apres l'operation. Je voudrais ne les voir
intervenir qu'en cas d'absolue necessite, se defendre energiquement
contre les operations qu'on pourrait appeler de complaisance:--comme
celle qui a ete pratiquee, contre mon avis, sur une malade qui se
croyait atteinte d'appendicite chronique, et qui n'etait que grande
nerveuse. Cette malade avait deja appele, malgre moi, quatre chirurgiens
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