, elle
pensait, comme le vulgaire des Russes, qu'au bout de trois jours l'on
revient; elle finit par s'endormir sur un canape.
A cinq heures, notre compagnie revint sur la place; elle etait de
nouveau commandee de piquet, de maniere que, croyant me reposer, je
fus encore de service pour vingt-quatre heures. Le reste du regiment,
ainsi qu'une partie du reste de la Garde, etait occupe a maitriser le
feu qui etait dans les environs du Kremlin; l'on en vint a bout pour
un moment, mais pour recommencer ensuite plus fort que jamais.
Depuis que la compagnie etait de retour sur la place, le capitaine
avait fait partir des patrouilles dans differents quartiers: une fut
envoyee encore du cote des bains, mais elle revint un instant apres,
et le caporal qui la commandait nous dit qu'au moment ou il arrivait,
l'etablissement s'ecroula avec un bruit epouvantable, et que les
etincelles, emportees au loin par un vent d'ouest, avaient mis le feu
a differents endroits.
Pendant toute la soiree et une partie de la nuit, nos patrouilles ne
faisaient que de nous amener des soldats russes que l'on trouvait dans
tous les quartiers de la ville, le feu les faisant sortir des maisons
ou ils etaient caches. Parmi eux se trouvaient deux officiers, l'un
appartenant a l'armee, l'autre a la milice: le premier se laissa
desarmer de son sabre, sans faire aucune observation, et demanda
seulement qu'on lui laissat une medaille en or pendue a son cote; mais
le second, qui etait un jeune homme, et qui, independamment de son
sabre, avait encore une ceinture remplie de cartouches, ne voulait pas
se laisser desarmer, et, comme il parlait tres bien francais, il nous
disait qu'il etait de la milice: c'etaient la ses raisons, mais nous
finimes par lui faire comprendre les notres.
A minuit, le feu recommenca dans les environs du Kremlin; l'on parvint
encore a le maitriser. Mais le 16, a trois heures du matin, il
recommenca avec plus de violence, et continua.
Pendant cette nuit du 15 au 16, l'envie me prit, ainsi qu'a deux de
mes amis, sous-officiers comme moi, de parcourir la ville, et de faire
une visite au Kremlin dont on parlait tant.... Nous nous mimes en
route: pour eclairer notre marche, nous n'avions pas besoin de
flambeaux, mais comme nous avions envie de visiter les demeures et les
caves des seigneurs moscovites, nous nous etions fait accompagner,
chacun, par un homme de la compagnie, muni de bougies.
Mes camarades connaissaient deja un peu l
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