sions se bornaient a jeter un coup d'oeil sur nous. Pas un ne se
leva de son siege ou ne se derangea de son occupation. On nous laissa
desseller nos chevaux et les placer ou nous le jugeames a propos.
J'etais fatigue de la course, apres avoir passe si longtemps sans faire
usage du cheval. J'etendis ma couverture par terre, et je m'assis, le dos
appuye contre un tronc d'arbre. J'aurais volontiers dormi, mais
l'etrangete de tous les objets qui m'environnaient tenait mon imagination
eveillee; je regardais et j'ecoutais avec une vive curiosite. Il me
faudrait le secours du pinceau pour vous donner une esquisse de la scene,
et encore ne pourrais-je vous en donner qu'une faible idee. Jamais
ensemble plus sauvage et plus pittoresque ne frappa la vue d'aucun homme.
Cela me rappelait les gravures ou sont representes les bivouacs de
brigands dans les sombres gorges des Abruzzes. Je decris d'apres des
souvenirs qui se rapportent a une epoque deja bien eloignee de ma vie
aventureuse. Je ne puis donc reproduire que les points les plus saillants
du tableau. Les petits details m'ont echappe; alors cependant les moindres
choses me frappaient par leur nouveaute, et leur etrangete fixait pendant
quelque temps mon attention. Peu a peu ces choses me devinrent familieres,
et des lors, elles s'effacerent de ma memoire comme le font les actes
ordinaires de la vie.
Le camp etait etabli sur la rive du Del-Norte, dans une clairiere
environnee de cotonniers dont les troncs lisses s'elancaient au-dessus
d'un epais fourre de palmiers nains et de _baionnettes_ espagnoles.
Quelques tentes en lambeaux etaient dressees ca et la; on y voyait aussi
des huttes en peaux de betes, a la maniere indienne. Mais le plus grand
nombre des chasseurs avaient construit leur abri avec une peau de buffalo
supportee par quatre piquets debout. Il y avait, dans le fourre, des
sortes de cabanes formees de branchages et couvertes avec des feuilles
palmees d'yucca, ou des joncs arraches au bord de la riviere. Des sentiers
frayes a travers le feuillage conduisaient dans toutes les directions. A
travers une de ces percees, on apercevait le vert tapis d'une prairie dans
laquelle etaient groupes les mules et les _mustangs_, attaches a des
piquets par de longues cordes trainantes. On voyait de tous cotes des
ballots, des selles, des brides, celles-la posees sur des troncs d'arbres,
celles-ci suspendues aux branches; des sabres rouilles se balancaient
devant les tentes et les h
|