mais
il etait trop tard pour celle qui etait en avant.
--Voila le lasso parti, cria l'un de nous.
Nous vimes le noeud traversant l'air et tombant sur le chef de file. Le
troupeau fit volte-face, mais la courroie etait enroulee autour du cou du
premier de la bande, qui, apres deux ou trois bonds, tomba sur le flanc et
demeura sans mouvement. Le chasseur sortit du bouquet de saules, et,
chargeant l'animal mort sur ses epaules, revint vers l'entree du defile.
Son compagnon suivait, effacant les traces du chasseur et les siennes
propres. Au bout de quelques instants ils nous avaient rejoints.
L'antilope fut depouillee et mangee crue, toute saignante.
Nos chevaux, affames et alteres, maigrissaient a vue d'oeil. Nous n'osions
pas aller trop souvent a l'eau, bien que notre prudence se relachat a
mesure que le temps se passait. Deux autres antilopes furent prises au
lasso par l'habile chasseur. La nuit qui suivit le quatrieme jour etait
eclairee par une lune brillante. Les Indiens marchent souvent au clair de
la lune, et particulierement quand ils suivent le sentier de la guerre.
Nous avions des vedettes aussi bien la nuit que le jour, et, cette
uit-la, nous exercames une surveillance avec meilleur espoir que
precedemment. C'etait une si belle nuit! pleine de lune, calme et pure.
Notre attente ne fut point trompee. Vers minuit, la sentinelle nous
eveilla. On distinguait au nord des formes noires se detachant sur le
ciel. Ce pouvaient etre des buffalos. Ces objets s'approchaient de nous.
Chacun de nous se tient le regard tendu au loin sur le tapis d'herbe
argentee, et cherche a percer l'atmosphere. Nous voyons briller quelque
chose: ce sont des armes, sans doute,--des chevaux,--des cavaliers,--ce
sont les Indiens!
--Oh! Dieu! camarades, nous sommes fous! et nos chevaux, s'ils allaient
hennir?....
Nous nous precipitons a la suite de notre chef en bas de la colline, a
travers les rochers et les arbres, nous courons au fourre, ou nos animaux
sont attaches. Peut-etre il est trop tard, car les chevaux s'entendent les
uns les autres a plusieurs milles de distance, et le plus leger bruit se
transmet au loin a travers l'atmosphere tranquille de ces hauts plateaux.
Nous arrivons pres de la _caballada_. Que fait Seguin? Il a detache la
couverture qui est a l'arriere de la selle, et il enveloppe la tete de son
cheval. Nous suivons son exemple; sans echanger une parole, car nous
comprenons qu'il n'y a pas autre chose a faire. Au
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