et sa longue
chevelure noire qui pendait derriere lui allait se meler a la queue de son
cheval. Il etait bien assis, sur une selle espagnole, sa lance, posee sur
l'etrier et reposant legerement contre son bras droit. Son bras gauche
etait passe dans les brassards d'un bouclier blanc, et un carquois plein
de fleches emplumees se balancait sur son epaule. C'etait un magnifique
spectacle que de voir ce cheval et ce cavalier se detachant sur le fond
vert de la prairie; un tableau qui rappelait plutot un des heros d'Homere
qu'un sauvage de l'Ouest.
--Wagh! s'ecria un des chasseurs a voix basse, comme ca brille! regarde
cette coiffure, c'est comme une braise.
--Oui, repliqua Garey, nous pouvons remercier ce morceau de metal. Nous
serions dans la nasse ou il est maintenant, si nous ne l'avions pas apercu
a temps. Mais, continua le trappeur, sa voix prenant un accent
d'exclamation, Dacoma! par l'Eternel c'est Dacoma, le second chef des
Navajoes!
Je me tournai vers Seguin pour voir l'effet de cette annonce. Le Maricopa
etait penche vers lui et lui parlait a voix basse, dans une langue
inconnue, en gesticulant avec energie. Je saisis le nom de _Dacoma_
prononce, avec une expression de haine feroce, par le chef indien qui, au
meme instant, montrait le cavalier qui avancait toujours.
--Eh bien, alors, repartit Seguin, paraissant ceder aux voeux de l'autre,
nous ne le laisserons pas echapper, qu'il voie ou non nos traces. Mais ne
faites pas usage de votre fusil; les Indiens ne sont pas a plus de dix
milles d'ici; ils sont encore la-bas, derriere ce pli de terrain. Nous
pourrons aisement l'entourer; si nous le manquons de cette facon, je me
charge de l'atteindre avec mon cheval et en voici encore un autre qui le
gagnera de vitesse.
Seguin, en disant ces derniers mots, indiquait Moro.
--Silence, continua-t-il, baissant la voix. Ssschht!
Il se fit un silence de mort. Chacun pressait son cheval entre ses genoux
comme pour lui commander l'immobilite. Le Navajo avait atteint la limite
du camp abandonne et inclinant vers la gauche, il galopait obliquement,
ecartant les loups sur son passage. Il etait penche d'un cote, son regard
cherchant a terre. Arrive en face de notre embuscade, il decouvrit l'objet
de ses recherches, et degageant son pied de l'etrier, dirigea son cheval
de maniere a passer aupres. Puis, sans retenir les renes, sans ralentir
son allure, il se baissa jusqu'a ce que les plumes de son casque
balayassent la
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