bout de quelques
minutes, nous avons reconquis notre securite, et nous remontons a notre
poste d'observation.
Nous nous y etions pris a temps, car, en atteignant le sommet, nous
entendimes les exclamations des Indiens, les _thoump, thoump_ des sabots
sur le sol resistant de la plaine; de temps en temps un hennissement
annoncant que leurs chevaux sentaient l'approche de l'eau. Ceux qui
etaient en tete se dirigeaient vers la source; et nous apercumes la longue
ligne des cavaliers s'etendant jusqu'au point le plus eloigne de
l'horizon. Ils approcherent encore, et nous pumes distinguer les
banderoles et les pointes brillantes de leurs lances. Nous voyons aussi
leurs corps demi-nus luire aux rayons de la lune. Au bout de quelques
instants, ceux qui etaient en tete atteignaient les buissons, faisaient
halte, laissaient boire leurs animaux, puis, faisant demi-tour, gagnaient
le milieu de la prairie au trot, et la, sautant a terre, deharnachaient
leurs chevaux. Il devenait evident que leur intention etait de camper la
pour la nuit. Pendant pres d'une heure, ils defilerent ainsi, jusqu'a ce
que deux cents guerriers fussent reunis dans la plaine sous nos yeux.
Nous observions tous leurs mouvements. Nous ne craignions pas d'etre vus.
Nos corps etaient caches derriere les rochers et nos figures masquees par
le feuillage des arbres du Pinon. Nous pouvions facilement voir et
entendre tout ce qui se passait, les sauvages n'etant pas a plus de trois
cents yards de notre poste. Ils commencent par attacher leurs chevaux a
des piquets disposes en un large cercle, au loin dans la plaine. La,
l'herbe est plus longue et plus epaisse que dans le voisinage de la
source. Ils detachent et rapportent avec eux les harnais, composes de
brides en crin, de couvertures en cuir de buffalo et de peaux d'ours gris.
Peu d'entre eux ont des selles. Les Indiens n'ont pas l'habitude de s'en
servir dans les expeditions de guerre. Chaque homme plante sa lance dans
le sol, et place, aupres de son bouclier, son arc et son carquois. Il
etend a son cote une couverture de laine, ou une peau de bete, qui lui
sert a la fois de tente et de lit. Les lances, bien alignees sur la
prairie, y forment un front de plusieurs centaines de yards, et en un
instant leur camp est forme avec une promptitude et une regularite a faire
honte aux plus vieilles troupes. Leur camp est divise en deux parties,
correspondant a deux bandes: celle des Apaches et celle des Navajoes. La
dern
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