iere est, de beaucoup, la moins nombreuse, et se trouve la plus
eloignee, par rapport a nous. Nous entendons le bruit de leurs tomahawks
attaquant les arbres du fourre au pied de la montagne, et nous les voyons
retourner vers la plaine, charges de fagots qu'ils empilent et qu'ils
allument. Un grand nombre de feux brillent bientot dans la nuit. Les
sauvages s'assoient autour et font cuire leur souper. Nous pouvons
distinguer les peintures dont sont ornes leurs visages et leurs poitrines
nues. Il y en a de toutes les couleurs: les uns sont peints en rouge,
comme s'ils etaient barbouilles de sang; d'autres en noir de jais. Ceux-ci
ont la moitie de la figure peinte en blanc et l'autre moitie en rouge ou
en noir. Ceux-la sont marques comme des chiens de chasse, d'autres sont
rayes et zebres. Leurs joues et leurs poitrines sont tatouees de figures
d'animaux: de loups, de pantheres, d'ours, de buffalos et autres hideux
hieroglyphes, vivement eclaires par l'ardente flamme du bois de pin.
Quelques-uns portent une main rouge peinte sur le coeur; un grand nombre
etalent comme devise des tetes de mort ou des os en croix. Chacun d'eux a
adopte un symbole correspondant a son caractere. Ce sont des ecussons ou
la fantaisie joue le meme role que dans le choix des armoiries que l'on
voit sur les portieres des voitures, sur les boutons des livrees, ou sur
la medaille de cuivre du facteur de magasin. La vanite est de tous les
pays, et les sauvages, comme les civilises, ont aussi leurs hochets.
Mais qu'est-ce donc? des casques brillants, de cuivre et d'acier, avec des
plumes d'autruche! Une telle coiffure a des sauvages! Ou ont-ils pris
cela? Aux cuirassiers de Chihuahua. Pauvres diables, tues dans quelque
rencontre avec ces lanciers du desert.
La viande saignante crepite au feu sur des broches de bois de saule, les
Indiens placent des noix du Pinon sous les cendres, et les en retirent
grillees et fumantes; ils allument leur pipe de terre durcie, et lancent
en l'air des nuages de fumee. Ils gesticulent en se racontant les uns aux
autres leurs sanglantes aventures. Nous les entendons crier, causer et
rire comme de vrais saltimbanques. Combien sont-ils differents des Indiens
de la foret! Pendant deux heures, nous suivons tous leurs mouvements et
nous les ecoutons. Enfin les hommes qui doivent garder les chevaux sont
choisis et se dirigent vers la caballada; des Indiens, l'un apres l'autre,
etendent leurs peaux de betes, s'enroulent dans leu
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