r qu'il se livrait a cet examen dans son cabinet, qui avait ete
celui de son frere, il tira les divers titres de propriete se
rapportant aux pieces de terre qu'il avait en vue, et se mit a les lire
en notant leurs contenances.
Pour cela il avait ouvert tous les tiroirs de son bureau, voulant faire
un classement qui le satisfit mieux que celui adopte par son frere.
Comme il avait completement tire un de ces tiroirs, il apercut une
feuille de papier timbre, qui avait du glisser sous le tiroir. Il la
prit, et, comme au premier coup d'oeil il reconnut l'ecriture de son
frere, il se mit a la lire.
"Je, soussigne, Gaston-Felix-Emmanuel Barincq (de Saint-Christeau),
demeurant au chateau de Saint-Christeau, commune de Ourteau
(Basses-Pyrenees)--declare, par mon present testament et acte de
derniere volonte, donner et leguer, comme en effet je donne et
legue, a M. Valentin Sixte, lieutenant de dragons, en ce moment en
garnison a Chambery, la propriete de tous les biens, meubles et
immeubles, que je possederai au jour de mon deces. A cet effet,
j'institue mon dit Valentin Sixte mon legataire a titre universel.
Je veux et entends qu'en cette qualite de legataire mon dit Valentin
Sixte soit charge de payer a mon frere Charles-Louis Barincq,
demeurant a Paris, s'il me survit, et a sa fille Anie Barincq, une
rente annuelle de six mille francs, ladite rente incessible et
insaisissable. Je nomme pour mon executeur testamentaire la personne
de maitre Rebenacq notaire a Ourteau, sans la saisine legale, et
j'espere qu'il voudra bien avoir la bonte de se charger de cette
mission. Tel est mon testament, dont je prescris l'execution comme
etant l'ordonnance de ma derniere volonte.
Fait a Ourteau le lundi onze novembre mil huit cent
quatre-vingt-quatre. Et apres lecture j'ai signe.
GASTON BARINCQ."
VIII
Il avait lu sans s'interrompre, sans respirer, courant de ligne en
ligne; mais des les premieres, au moment ou il commencait a comprendre,
il avait ete oblige de poser sur son bureau la feuille de papier, tant
elle tremblait entre ses doigts.
C'etait un coup d'assommoir qui l'ecrasait.
Apres quelques minutes de prostration, il recommenca sa lecture,
lentement cette fois, mot a mot:
"Je donne et legue a monsieur Valentin Sixte... la propriete de tous
les biens, meubles et immeubles, que je possederai au jour de mon
deces."
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