nt parce que ses regards la rencontraient. Devant une table, un
greffier ecrivait, et pres de la porte deux gendarmes attendaient avec
la physionomie ennuyee et vide de gens qui sont ailleurs.
Bientot le juge d'instruction leva la tete vers eux:
--Vous pouvez emmener l'inculpee.
Puis tout de suite s'adressant a Florentin, il lui demanda son nom, ses
prenoms, et son domicile.
--Vous avez ete le clerc de l'agent d'affaires Caffie; pourquoi
l'avez-vous quitte?
--Parce que mon travail etait trop penible.
--Vous craignez le travail?
--Non, quand il n'est pas excessif; il l'etait chez M. Caffie et ne
me laissait pas le temps de travailler pour moi: je devais arriver a
l'etude le matin a huit heures, j'y dejeunais et n'en partais qu'a sept
heures pour aller diner chez ma mere aux Batignolles; j'avais une heure
et demie pour cela; a huit heures et demie il fallait que je fusse de
retour et je restais jusqu'a dix heures ou dix heures et demie. En
acceptant cette place j'avais cru que je pourrais achever mon education
interrompue par la mort de mon pere, faire mon droit, et devenir mieux
qu'un miserable clerc d'homme d'affaires; cela n'etait pas possible avec
M. Caffie: je le quittai, et ce fut cette seule raison qui nous separa.
--Ou avez-vous ete ensuite?
C'etait la la question delicate, celle que Florentin redoutait, car elle
pouvait soulever contre lui des preventions que rien ne detruirait;
cependant il ne pouvait pas ne pas repondre, car ce qu'il ne dirait pas
lui-meme d'autres le reveleraient: une enquete sur ce point etait trop
facile.
--Chez un autre homme d'affaires, M. Savoureux, rue de la Victoire, ou
je ne devais pas travailler le soir. J'y suis reste trois mois environ
et suis parti pour l'Amerique.
--Pourquoi?
--Parce que, lorsque j'ai voulu me mettre serieusement au travail je me
suis apercu que mes etudes avaient ete interrompues trop longtemps pour
qu'il me fut possible de les reprendre: j'avais oublie une bonne
partie de ce que j'avais mal appris; j'echouerais sans doute a mon
baccalaureat, je ne pourrais commencer mon droit que trop tard. Je
quittai la France pour l'Amerique, ou j'esperais trouver une bonne
situation.
--Vous etes revenu a Paris.
--Il y a trois semaines.
--Et vous avez ete chez Caffie?
--Oui.
--Quoi faire?
--Lui demander un certificat qui remplacat celui qu'il m'avait donne et
que j'avais perdu.
--C'est le jour du crime.
--Oui.
--A quelle heur
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