... lorsque je sens la crise venir, il entre en moi comme un
souffle de haine furieuse contre l'humanite... Dans ces minutes-la, je
voudrais detruire tout ce qui m'entoure, mettre le feu a Paris comme je
t'ai dit que cet empereur fit de Rome, frapper, tuer... Ah! Marie, on
m'a trop dit que les rois ne sont forts que lorsqu'on les redoute,
lorsqu'ils tuent... et cela, vois-tu, m'est entre dans le sang...
--Allons, tout cela passera... Il ne te faut qu'un peu de repos...
--Oui... du calme... du repos... Mais ou en trouver hormis ici? Je suis
entoure de conspirateurs.
--N'y songe pas en ce moment. Prends ici, du moins, le peu de repos qui
calme ta pauvre chere tete... plains-toi, dis-moi ce que tu as souffert,
mais ne me dis pas ce que tu redoutes... Tu es le roi... nul n'oserait
te toucher..."
Elle parla ainsi longuement de sa voix douce, le bercant, le
consolant...
Mais, cette fois, le roi ne voulait pas etre console. Trop de choses et
des choses trop terribles se preparaient autour de lui. Et, comme
il n'osait en parler, il se mit a raconter que le parti des Guises
travaillait a sa perte et que sa mere avait decouvert la preuve de
la conspiration, et que, ce matin meme, on allait questionner deux
dangereux acolytes de Guise.
--Voici neuf heures, termina-t-il. Dans une heure, ces maudits
Pardaillan auront tout avoue, et je saurai la verite.
Marie Touchet jeta un cri.
--Tu dis qu'on va questionner deux hommes qui s'appellent Pardaillan?
--Oui-da. Ce sont sans doute des serviteurs de Guise.
--Sire, s'ecria Marie Touchet, je vous demande grace pour ces deux
hommes.
--Ca! perds-tu la tete?...
--Non, non, mon bon Charles! Ne t'ai-je pas dit que j'ai ete sauvee par
deux inconnus qui m'ont dit s'appeler Brisard et La Rochette?... Eh
bien, ce sont eux! Ramus a su leurs vrais noms...
--Ah! tu vois bien qu'ils conspirent, puisqu'ils cachent leurs noms!...
Ecoute, Marie, veux-tu que je sois tue?...
--Charles! Mon Charles! Je te jure qu'ils ne peuvent etre coupables! Oh!
tu les cherchais pour les combler d'honneurs... et voici qu'on va les
questionner!... Ceci est affreux, sire! Ces deux hommes m'ont sauvee! Si
je suis vivante, c'est a eux que je le dois.
--Marie!...
--Non, Charles! Je serais une infame si je laissais livrer au bourreau
deux vaillants gentilshommes qui ont risque leur vie pour moi! Ne
peux-tu les faire venir au Louvre? les interroger sans l'aide du
bourreau? Ils diront tout! Je m
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