eur coeur et qui, au bruit de ces gens entrant
dans leur prison, se reveillerent, effares.
--Messieurs, dit Pardaillan, veuillez vous habiller en toute hate et me
suivre.
--Bah! fit l'un, est-ce pour aller en place de Greve?
--Est-ce pour aller achever la nuit aupres de nos maitresses? fit
l'autre.
--C'est vous qui avez devine, monsieur, dit Pardaillan.
A ces mots prononces tres simplement, les prisonniers firent un bond et,
tout tremblants, sauterent a bas de leurs lits. Celui qui avait parle le
dernier s'elanca vers le chevalier et dit:
--Monsieur, ecoutez-moi: voici M. de Chalabre, qui a vingt-deux
ans; voici M. de Montsery, qui en a vingt; moi-meme, marquis de
Sainte-Maline, j'en ai vingt-quatre. C'est vous dire quelle affreuse
cruaute ce serait de votre part de nous offrir la liberte a l'heure
ou nous attendons la mort, si cette liberte n'est qu'une ironie...
Monsieur, nous sommes condamnes a mort par M. de Guise parce que nous
sommes des gentilshommes fideles a Sa Majeste... Par grace! dites-nous
la verite: ou nous conduisez-vous?
--Je vous l'ai dit, repondit Pardaillan avec une gravite empreinte d'une
souveraine pitie.
--Nous sommes donc libres! haleterent les infortunes jeunes gens.
--Vous allez l'etre!...
--Votre nom! votre nom! dirent les trois prisonniers avec une
prodigieuse emotion.
--Puisque vous m'avez fait l'honneur de me dire le votre, messieurs, on
m'appelle le chevalier de Pardaillan...
En un tour de main, les trois jeunes gens furent habilles. A chacun
d'eux, Pardaillan remit une arquebuse. Alors, celui qui s'appelait
marquis de Sainte-Maline salua Pardaillan avec autant de ceremonie et
de gracieuse aisance que s'il se fut trouve a une presentation dans un
salon du Louvre.
--Monsieur de Pardaillan, dit-il, nous vous sommes redevables de trois
libertes et de trois vies. Quand il vous plaira, ou il vous plaira,
venez nous demander trois vies et trois libertes!
Pardaillan s'inclina comme pour, prendre acte de cette promesse.
--En route, messieurs, fit-il d'un ton bref. Et toi, marche!
Comtois leva les bras au ciel et obeit.
Le geolier avait monte un etage et ouvert une porte. Pardaillan et
Charles entrerent, tandis que le reste de la troupe attendait dans
l'escalier. A la lueur de son falot, Pardaillan vit un vieillard
decemment vetu, le visage empreint d'une noble intelligence; il
travaillait a la lueur d'une petite lampe a des dessins et des plans
qu'il tracait
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