ez donc,
morbleu! puisque vous etes libres!...
Alors une clameur terrible eclata parmi ces gens, faite de sanglots et
de hurlements indistincts de leur joie furieuse. Et, levant les bras au
ciel, se poussant, se ruant, ils se precipiterent sur le pon-levis; en
quelques instants, leur troupe affolee se fut dispersee dans les ruelles
avoisinantes... il n'y avait plus de prisonniers a la Bastille!
--Maintenant, allons-nous-en, dit Pardaillan.
Et a son tour, avec Charles d'Angouleme, il franchit le pont-levis.
--Monsieur le gouverneur?... dit pres de lui le sergent qui l'avait
escorte chapeau bas, voulez-vous me donner vos ordres? Dois-je fermer
les portes?...
--Ah ca! mon cher, a quel gouverneur parlez-vous? dit Pardaillan.
--Mais, balbutia le sergent, a vous!... Car, je suppose que vous etes le
nouveau gouverneur.
--Tiens! fit Pardaillan qui se frappa le front. J'allais justement
oublier... Mon ami, faites-moi le plaisir d'aller a la tour du Nord
et de delivrer ceux de vos camarades que j'y ai enfermes. Quant au
gouverneur... M. de Bussi-Leclerc! Vous le trouverez au cachot du
deuxieme sous-sol ou il doit fort pester. Allez, mon ami, allez.
--Mais vous n'etes pas le nouveau gouverneur? rugit le sergent, bleme
devant ce qu'il entrevoyait.
--Moi? fit Pardaillan avec cette froideur qu'il avait dans les moments
ou il s'amusait a l'exces, moi? je suis un prisonnier comme ces
messieurs que vous avez pousses dehors. Et, vous voyez, je fais comme
eux, je m'en vais...
Le sergent demeura sur place, comme frappe de la foudre. Quand il reprit
ses sens, Pardaillan et Charles etaient deja loin. A demi fou, le
sergent vocifera a une patrouille qui passait au pas de course d'entrer
a la Bastille. Mais la patrouille courait aux remparts et ne s'inquieta
pas de ces cris. D'ailleurs tout criait dans Paris. Et, comme le soleil
se levait, un etrange spectacle apparut aux yeux des rares Parisiens
demeures chez eux.
La plupart des maisons etaient barricadees; dans les rues, les chaines
etaient tendues. Tout ce qui etait valide etait aux remparts. Et, sur
ces remparts, c'etait une foule enorme, grouillante, interrogeant les
horizons paisibles...
Le duc de Guise, poste a la porte Neuve, qui etait le point faible parce
qu'on pouvait essayer de passer par la Seine, le duc de Guise avait
concentre la ses meilleures troupes. Des cavaliers etaient partis hors
du mur pour tacher de reconnaitre les forces royalistes...
Et,
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