i s'elanca.
XXXIV
LES DEUX PERES
Belgodere avait acheve la nuit sur la place de Greve, suivant les
allees et venues des aides qui construisaient les machines destinees au
supplice de Madeleine et Jeanne Fourcaud. Ces machines, d'une formidable
simplicite, consistaient en deux potences pareilles a toutes les
potences. Seulement, autour de chacune de ces potences, on avait entasse
des fascines methodiquement disposees, et, au-dessus des fascines, des
pieces de bois sec.
A la corde, on pendait le ou la condamnee. Puis on mettait le feu aux
fascines, les flammes montaient, enveloppaient le corps, brulaient enfin
la corde; le corps tombait dans le brasier et achevait de se consumer.
Belgodere assista donc a ces preparatifs. Lorsque les deux buchers
furent termines autour des deux potences, il vit que les memes ouvriers
edifiaient un large echafaud auquel on accedait par quatre marches et
qui fut entierement recouvert d'un tapis. C'etait pour Guise et sa
suite.
Cependant, le jour venait et, a mesure que la lumiere inondait la place,
elle se remplissait peu a peu de monde. De tous les coins de Paris, des
groupes endimanches et rieurs arrivaient et prenaient place.
Vers huit heures, une compagnie d'archers de la Ligue s'avanca sur la
place. Des acclamations retentirent: le moment approchait. Belgodere
allait et valait dans cette multitude. Un livide sourire crispait ses
levres. Il lui semblait que cette masse enorme de peuple etait la pour
celebrer sa vengeance.
Il s'etait approche de cette partie de la place qui bordait le fleuve et
qui etait la greve proprement dite. La, une litiere venait d'arriver.
Elle s'etait placee de facon que les personnes qu'elle contenait pussent
embrasser toute la scene. Une vingtaine d'hommes armes d'epees et de
poignards entouraient cette litiere, dont les rideaux de cuir etaient
fermes.
Un instant, ces rideaux s'entrouvrirent, et Belgodere apercut
l'interieur tapisse de satin blanc. Une tete pale se montra, puis
disparut... Si rapide qu'eut ete cette apparition, le bohemien l'avait
reconnue:
"La Fausta!" murmura-t-il
A ce moment, une fanfare de trompettes retentit sur la place, des
exclamations delirantes eclaterent dans un roulement de tonnerre. De
la rue du Temple debouchait un quadruple rang de cavaliers aux toques
ornees de touffes de plumes, aux pourpoints de soie cramoisie sur
lesquels se detachait l'ecusson de Guise. Ils levaient vers le ciel le
pavillon de
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