fille au sourire effronte, aux yeux hardis, c'etait encore une
religieuse. Elle se planta resolument devant maitre Claude et, d'une
voix caline, demanda:
--Ce beau cavalier est sans doute de l'escorte qui vient de s'arreter
devant le porche?
--En effet, je suis de la suite de la princesse, et j'ai ordre de venir
la retrouver.
--Si vous allez chez l'abbesse, vous n'avez qu'a suivre ces deux
soeurs...
Les deux soeurs etaient vetues en religieuses. Elles marchaient
lentement, la tete baissee et les bras croises. Car, dans ce couvent, il
y avait quelques soeurs demeurees pures.
Entre ces deux femmes, marchait, silencieuse, la bohemienne au masque
rouge... Saizuma. Claude les laissa passer. Il se mit a les suivre.
Les deux religieuses frapperent a une porte qui s'ouvrit. Alors elles
prirent chacune Saizuma par une main et entrerent. Quelques instants
plus tard, elles sortirent seules et s'eloignerent lentement. Alors
maitre Claude s'approcha de la porte. Mais la, il s'arreta et passa
ses deux mains sur son front. La facilite avec laquelle il marchait a
l'evenement terrible lui causait une angoisse qu'il n'eut pas eprouvee
s'il lui avait fallu traverser mille dangers...
Claude avisa a quelques pas une porte entrouverte; il y alla, et
se trouva dans une etroite piece sans meubles ou regnait une
demi-obscurite. Dans cette solitude, Claude, les bras croises, se prit a
songer. Que venait-il faire la?...
Tuer. Ou tout au moins s'emparer d'une femme qu'il allait livrer
au prince Farnese. Une haine terrible l'animait contre Fausta. La
meurtriere de sa fille devait mourir. Mais il lui semblait que des
souvenirs s'agitaient au fond de sa memoire.
"Cette bohemienne, qui marche entre deux religieuses, a une allure que
je reconnais, songea maitre Claude.
Il medita longtemps sur ce sujet, ayant oublie a ce moment Farnese et
Fausta. Puis se decida.
Les deux religieuses conduisant Saizuma etaient entrees chez l'abbesse.
--Madame, dit l'une des religieuses, deux hommes viennent encore
d'entrer sur le territoire de la communaute.
--Helas! fit Claudine, les murs de notre pauvre couvent sont en ruine.
Comment pourrions-nous empecher ces incursions de l'Amalecite? Allez
prier, mes soeurs, allez...
Cette reponse impudente, Claudine la fit sur un ton de douloureuse
piete. Les deux soeurs s'inclinerent et sortirent. Sans doute Fausta
etait au courant des moeurs extraordinaires de ce couvent, car elle ne
parut nulleme
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