te, ses deux
filles avaient crie qu'elles aussi etaient de la religion nouvelle,
c'est-a-dire protestantes; on les avait donc trainees a la Bastille, ou
leur pere n'avait pas tarde a succomber.
Sommees d'abjurer, moyennant quoi on leur offrait la liberte, les filles
de Fourcaud avaient repondu qu'elles preferaient mourir. L'une de ces
infortunees s'appelait Jeanne; elle avait dix-sept ans et etait jolie a
damner un saint; l'autre s'appelait Madeleine et avait vingt ans.
--Je leur ai promis les Fourcaudes, continua Bussi-Leclerc. Ils etaient
tout a l'heure dix mille qui m'assourdissaient de leurs cris et qui
se demenaient le long des fosses de la Bastille. J'ai fait entrer une
douzaine des plus enrages, je leur ai demande ce qu'ils voulaient.
--Nous voulons pendre et bruler les heretiques "Fourcaudes", ont-ils dit
tout d'une voix...
--Et alors? dit Guise en baillant.
--Alors, monseigneur, il y aura demain un beau feu de joie en lequel les
damnees Fourcaudes seront bellement grillees, non toutefois sans avoir
ete un peu pendues.
--Le sire de Maineville demande a etre introduit aupres de Monseigneur,
dit a ce moment un valet.
Guise fit un signe. La porte s'entrouvrit, laissant voir la salle
remplie de gentilshommes armes, qui attendaient anxieusement les
decisions qu'allait prendre le maitre, le roi de Paris. Maineville
entra, et, comme s'il se fut trouve devant le roi, attendit en silence.
--Parle, dit Guise, qu'as-tu a nous raconter?
--Monseigneur, j'ai a dire qu'il y a dans Paris une etrange emotion. Vos
Parisiens enragent de soif... et, pour une soif pareille, monseigneur,
il faut une boisson rouge. Il n'y a que le sang pour etancher la soif
des Parisiens quand ils se mettent a crier.
--Eh bien, qu'on leur en donne! dit Guise. Demain, les Fourcaudes...
Il se fit un moment de silence. Ces nouvelles, successivement apportees
a Guise par Bussi-Leclerc, par Maineville et par d'autres qui les
avaient precedes, lui indiquaient qu'il etait temps de prendre une
decision. Et c'etait justement devant cette decision qu'il reculait
encore.
Pendant ces journees ou nous le voyons si hesitant, si tourmente d'un
amour qui le rongeait. Guise etait aussi preoccupe d'une pensee de
vengeance. L'affaire de la place de Greve avait remis en sa presence ce
Pardaillan dont, depuis l'effroyable journee de la Saint-Barthelemy, il
avait garde un terrible souvenir. Or, le meme Pardaillan venait de lui
porter un coup qui
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