cette fois, il trouvait un redoutable adversaire. Jamais il n'avait
rencontre poignet plus souple et plus ferme, rapiere plus vivante,
pointe plus menacante. Il essaya de faire rompre l'inconnu.
Celui-ci demeura ferme, cloue sur place, les epaules effacees, n'offrant
aucune prise. Soudain, il se detendit comme un ressort, et ce fut
Pardaillan qui dut faire un bond en arriere...
--Mes compliments, dit le chevalier, avec un coup pareil, vous aviez
toutes les chances de me tuer... toutes moins une. C'est justement cette
une qui me sauve!
A son tour, il attaqua, et peut-etre, avec sa science consommee de
l'escrime, trouva-t-il a diverses reprises l'occasion de toucher son
adversaire a la poitrine. Mais Pardaillan avait dit qu'il ne toucherait
qu'au visage.
Maintenant le jour grandissait; tout a coup l'un des deux combattants
venait de jeter un cri terrible, le cri de l'homme blesse a mort...
Pourtant, aucun des deux adversaires ne tombait!...
Celui qui avait pousse ce cri, c'etait l'inconnu. Pardaillan, apres une
serie d'attaques combinees avec un art superieur, l'avait touche au
front... La pointe avait traverse le masque qui, arrache, etait demeure
fixe au bout de la rapiere.
--Une femme!... fit Pardaillan stupefait...
Et il abaissa la pointe de sa rapiere.
Fausta portait au front une petite tache rouge: une gouttelette de sang.
Elle leva la tete vers le ciel et peut-etre songea-t-elle que cette
blessure n'atteignait pas seulement son front, mais quelque chose de.
plus profond qui etait en elle depuis des annees... la foi...
Oui, c'etait cette foi qui etait touchee en elle, blessee pour la
premiere fois. Fausta se vit dechue.
Pardaillan, d'un geste tranquille, releva son epee.
Il recula de deux pas, souleva son chapeau et s'inclinant:
--Si j'avais su avoir l'honneur de croiser le fer avec la princesse
Fausta, dit-il, je vous jure, madame, que je me fusse laisse toucher.
Il appuya sur ce mot a double sens. Fausta le considera d'un regard
flamboyant et riposta par ce seul mot:
--Defendez-vous...
Pardaillan rengaina son epee. Elle marcha sur lui, pantelante d'amour et
de haine ecumante, splendide et terrible. Elle saisit son epee par le
milieu de la lame et, cette epee, devenue poignard, elle la leva sur le
chevalier et se rua, sans un cri, sans un mot. Pardaillan, d'un geste
prompt, saisit le poignet de Fausta d'une main, l'epee de l'autre;
presque a la meme seconde elle se trouva desarmee
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