ut ete abandonne; les jardins, jadis si
beaux, n'etaient plus qu'une foret de ronces. Le potager, qui se
trouvait sur les derrieres du couvent, demeurait seul assez bien
cultive, les habitantes de ce lieu etrange se nourrissant principalement
des legumes qu'elles faisaient pousser. Ce potager etait clos d'un mur
d'enceinte comme le reste du couvent; mais, a ce mur, il y avait, de
place en place, de larges breches qui, sous les pieds de mysterieux
visiteurs, avaient fini par former de veritables passages ouverts.
Ce fut vers l'une de ces breches que maitre Claude se dirigea, suivi du
prince Farnese, pensif.
Non loin se trouvait un vieux pavillon d'elegante architecture, jadis
construit par quelque abbesse qui venait y chercher le repos et la
solitude, mais qui, maintenant, n'etait plus qu'une ruine. Claude, d'un
coup d'epaule, defonca la porte vermoulue. Ils entrerent.
--Attendez-moi la, dit maitre Claude.
Farnese acquiesca d'un signe de tete et demeura immobile, tandis que
l'ancien bourreau s'eloignait.
La princesse Fausta etait entree dans le couvent. Malgre l'incroyable
puissance de caractere de cette femme, un trouble indefinissable
paraissait sur son visage.
Precedee de deux jeunes religieuses, a la physionomie plus mutine que
devote, Fausta parvint au premier etage et, sur l'immense palier
ou s'ouvrait un profond couloir, rencontra l'abbesse Claudine de
Beauvilliers qui se hatait de venir au-devant de son illustre visiteuse.
Celle-ci eut un agenouillement rapide, et Fausta leva la main, les trois
premiers doigts ouverts, signe mysterieux... benediction que seuls
peuvent donner les successeurs de saint Pierre! Mais ce fut si rapide
que les deux religieuses ne virent rien de ce geste.
Claudine, deja, marchait devant Fausta et, lui montrant le chemin, la
fit penetrer dans une piece meublee avec un luxe disparate. Sur une
table de marbre a coins rehausses d'argent, c'etait tout l'attirail des
brosses, des pinceaux, des pots et des flacons, onguents et cosmetiques
alors en usage non seulement pour les femmes, mais aussi pour les
hommes. Et, au-dessus de cette table, un Christ d'or etendait ses bras.
L'abbesse roula un large fauteuil et, lorsque Fausta se fut assise,
placa sous ses pieds un coussin de velours. Elle-meme demeura debout.
--Cette femme... cette bohemienne est toujours ici? demanda alors
Fausta.
--Oui, madame. Selon vos ordres, nous la surveillons etroitement. Votre
Saintete desire-t-el
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