ardaillan, d'un battement sec, fit devier la rapiere dont la pointe
erafla son pourpoint.
--Vous parlez de clouer, repondit-il. En effet, vous manoeuvrez votre
epee comme un clou. Tenez, je vais vous donner une lecon... regardez
bien...
--Miserable! rugit Bussi-Leclerc.
A ce moment, son epee lui sauta des mains et alla tomber a dix pas. Il
voulut courir la ramasser. Mais il se heurta a Picouic qui braquait sur
lui un pistolet... Bussi-Leclerc se croisa les bras et baissa la tete.
C'est a peine s'il s'apercut que le Picouic lui ficelait les jambes
d'abord, puis les bras... puis le portait et l'etendait aupres de
Maineville.
--Achevons de diner, dit Pardaillan, qui, ayant rengaine sa rapiere, se
remit a table. Ah! ca, maitre Picouic, a quoi pensez-vous... mon verre
est vide...
--Je crois, cher ami, qu'il est temps de nous en aller, dit a ce moment
Charles d'Angouleme, qui venait de s'approcher de la fenetre. Voyez...
Pardaillan alla voir. Aux lueurs de l'aube naissante, il apercut, au
pied de la butte, une troupe qui se deployait en ordre d'assaut. C'etait
une longue ligne d'arquebusiers flanquee a gauche et a droite par un
double rang d'archers. Au loin, par la porte Saint-Honore, arrivaient
des bandes de bourgeois, la pertuisane au poing, qui hurlaient.
Il resulta de l'ensemble de ces circonstances qu'au soleil levant il y
avait autour de la butte quatre ou cinq mille hommes.
"Diable! fit Pardaillan, il est temps, en effet, de nous en aller; mais
je crois bien que, pour le moment, c'est plus facile a dire qu'a faire.
--Cependant, observa doucement Charles, nous devions, ce matin, aller
voir la bohemienne; vous me l'avez promis, Pardaillan. Il faut nous en
aller.
--Nous nous en irons, fit Pardaillan. Mais quels cris assourdissants!...
Hola, maitre Picouic, au travail! Chargez sur votre dos M. de
Maineville, moi je prends M. Bussi-Leclerc, qui est le plus lourd...
Des clameurs terribles s'elevaient de l'armee assiegeante. A mi-cote,
les assiegeants s'arreterent. Ils attendaient la decharge des assieges
et s'etonnaient de leur silence.
--Ils preparent quelque mechant coup, dit Guise a Maurevert. Mais ou est
Maineville? Ou est Bussi?...
Et, pendant ce temps, celui qui etait la cause de tout ce tumulte,
enferme dans le moulin avec ses deux compagnons, se preparait froidement
a quelque defense desesperee.
Pardaillan avait pratique des ouvertures a travers les planches mal
jointes du moulin. Et,
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