e etait alors, surtout pour le nord et l'occident de l'Europe,
la capitale des lettres et des arts. Elle a ete de bonne heure, elle
est restee toujours le centre de cette philosophie du moyen age qu'on
a nommee la _scolastique_. Ce nom ne designe pas autre chose que la
philosophie des ecoles ou cette dialectique que nous avons decrite.
Les ecoles etaient assez nombreuses en France, et pour la plupart
episcopales, c'est-a-dire qu'elles etaient ouvertes ordinairement sous
le patronage et la surveillance de l'eveque et meme dans sa maison.
Ces institutions avaient succede aux ecoles palatines, fondees par
Charlemagne, grande et passagere creation, comme presque toutes celles
de cet homme qui devanca trop son temps, et manqua l'avenir pour l'avoir
devine trop tot. Ce qu'il avait voulu placer dans le palais s'etait donc
produit dans l'eveche ou meme a la porte du cloitre[9]. Dans ces ecoles,
qui differaient de reputation et quelquefois de doctrine, comme les
eveques eux-memes, on enseignait toujours la theologie et souvent les
sciences profanes, y compris la philosophie. Cet ordre d'institutions
dura longtemps; il en est reste au chef-lieu de tous les dioceses,
aupres de tous les eveques, deux titres portes par des pretres et qui
representent le double enseignement du passe: l'un est le titre de
theologal, et l'autre celui d'ecolatre.
[Note 9: "Carolus.... seculares quodam modo litteras fecit et a
coenobiis ad palatium evocavit." (Duboulai, t. 1, p. 95.) Je parle ici
d'apres l'idee recue qui attribue a Charlemagne la creation permanente
d'ecoles royales tenues dans son propre palais. _Domus regia schola
dicitur_, disait le concile de Kierzy en 858 (Ibid. p. 106). Ce prince
aurait ainsi concu et realise la veritable instruction publique, celle
de l'Etat. J'avoue que M. Ampere a singulierement ebranle cette idee.
Au reste, les ecoles episcopales elles-memes doivent encore etre
originairement rapportees a Charlemagne; c'est lui qui en prescrivit la
formation par un capitulaire de 789. (_Histoire litteraire de la France
avant le XIIe siecle_, par M. Ampere, t. III, c. II.)]
A l'epoque dont nous parlons, ou vers l'an 1100, il n'y avait donc pas
d'Universite de Paris. Il y avait des ecoles a Paris, et parmi elles,
au-dessus de toutes, l'ecole episcopale, la plus frequentee et la plus
celebre[10]. Les etudiants y accouraient de tres-loin, non-seulement de
toute la France, ce qui etait peu dire, mais de toute la Gaule et des
pa
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