capitale du monde, a la veille d'etre cernee
par l'ennemi, n'avait pas un canon sur ses remparts, pas un soldat dans
ses forts. Mais ce qu'ils ne manqueront pas d'affirmer, c'est que les
habitants de Paris, en traversant ces heures les plus nefastes de leur
histoire, puisaient comme une nouvelle force dans les malheurs qui
venaient de frapper la France, sans pities sans relache; c'est que leur
energie semblait croitre en raison directe des dangers qui les menacaient.
Quand, le 15 septembre, les journaux annoncent que les uhlans sont
signales aux portes de Paris, le public accueille cette nouvelle avec
le sang-froid qui denote la resignation. On sent que quelque chose de
terrible est menacant, que des evenements uniques dans les annales des
peuples vont se produire; il y a dans l'air des nuages epais, precurseurs
d'une tempete horrible; mais on envisage l'avenir sinon sans emotion, du
moins sans defaillance ni faiblesse. Tous les coeurs vibrent a l'unisson
au sentiment de la Patrie en danger.
Rien n'est pret pour la defense; il faut tout faire a la fois et en toute
hate. Chaque enfant de Paris, entraine par un irresistible elan, veut
avoir sa part de travail dans l'oeuvre commune. Les architectes, les
ingenieurs remuent la terre des bastions; les chimistes preparent des
poudres fulminantes et des torpilles; les metallurgistes fondent des
canons et des mitrailleuses, tous les bras s'arment de fusils.
Mais au milieu de cette effervescence, une question de premier ordre,
question vitale, s'il en fut, vient s'imposer a l'administration. En
depit des affirmations du genie militaire, les Parisiens sont bel et bien
bloques dans leurs murs. Quelques courriers a pied franchissent d'abord
les lignes ennemies, mais bientot, d'autres reviennent consternes, ils
n'ont pas rencontre un sentier sur quelque point que ce fut, ou le "qui
vive" ennemi ne les ait contraints de rebrousser chemin. M. de Moltke a
resolu ce probleme inoui: investir une ville de deux millions d'habitants,
faire disparaitre sous un cordon de baionnettes, la plus immense place
forte de l'univers. La capitale du monde se laissera-t-elle emprisonner
vivante dans un tombeau? Lui sera-t-il interdit de parler a la France,
de communiquer au dehors son energie, sa foi, son courage, d'avouer ses
deceptions, ses faiblesses, ses inquietudes, d'affirmer ses joies, sa
force et ses esperances? Ne pourra-t-elle pas protester a haute voix
contre un bombardement barbare, cont
|