contemple a la hauteur de trente pyramides! Quels reflets magiques
au milieu de ces vallees vaporeuses, aussi blanches que la neige des
montagnes, aussi etincelantes que des paillettes adamantines!
Dans un de nos precedents voyages, nous avons pu montrer un spectacle
analogue a un navigateur qui avait sonde tous les coins du globe; juche
dans la nacelle, il admirait, muet d'etonnement.
--J'ai vu, nous disait-il, le soleil se coucher au milieu des glaciers
polaires, se perdre dans la mer d'azur de la baie de San-Francisco, j'ai
vu les grandes scenes que la nature dessine au cap Horn, j'ai fait le tour
du monde, mais jamais pareille scene ne m'avait tant emu!
Qu'on ne nous accuse pas d'enthousiasme facile, ou d'exageration. Quand
la nature se mele de faire du beau dans ce monde aerien, elle enfante
d'incomparables merveilles. La haut, il y a toute une revelation de
couleurs et de lumieres, qui defieront a jamais le pinceau des Michel-Ange
futurs aussi bien que la plume des Goethe de l'avenir.
Peu a peu le soleil s'abaisse a l'horizon. Quand il va se noyer dans la
mer des nuages, il y jette ses derniers feux. L'immensite s'embrase, pour
s'eteindre tout a coup.
Ces rayons ardents nous evitent de jeter du lest; mon frere retrace sur
son album aerostatique, ce tableau celeste aussi fidelement que crayon
peut le faire. Quant a moi je surveille l'aiguille du barometre. Le soleil
nous aspire, nous appelle a lui, et de couches d'air en couches d'air,
nous atteignons l'altitude de 3,200 metres.
A 5 heures, l'obscurite est presque complete. Le froid ne tarde pas a
se faire sentir; aussi l'aerostat, plus impressionnable que l'organisme
humain, est brusquement saisi; son gaz se contracte, sa force
ascensionnelle diminue. Il descend avec une grande rapidite, revient en
vue de terre, ou le vent le jette sur la Seine, qu'il traverse lentement a
500 metres de haut. Bientot nous planons au-dessus d'une campagne couverte
d'arbres, comprise entre deux bras du fleuve. C'est la foret de Rouvray,
qui s'etend a nos pieds comme un immense tapis de verdure.
Le vent parait avoir change de direction, il nous dirige vers l'Ocean. Ce
n'est pas encore dans l'enceinte des forts de Paris que nous toucherons
terre! Ayons le courage de faire contre fortune bon coeur, abandonnons nos
belles esperances, comptant bien les retrouver plus tard.
Nous descendons si pres de terre que nos guide-ropes, longs de 200 metres,
touchent le sommet des ar
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