nus de Paris en ballon avec leurs messagers ailes, mais ils touchent
encore de ce cote de bonnes et grasses retributions.--Pendant que nous
allons gonfler plus tard nos ballons au Mans, a Laval, notre colonel et
notre commandant resteront a Poitiers, jouant au billard et fumant des
cigares. Le premier janvier, ils seront nommes chevaliers de la Legion
d'honneur pour action d'eclat.--Vous riez, n'est-ce pas? Et cependant
rien n'est plus vrai, les choses se sont passees exactement comme nous le
disons la. Ce serait comique, si ce n'etait navrant, car il est a supposer
malheureusement que ce fait n'est pas isole, et que la France a ete en
proie a un desordre, un gaspillage inouis, eleves a la hauteur d'une
institution.
Helas! faut-il qu'aujourd'hui, comme hier, il y ait memes abus, memes
faveurs! Est-il donc ecrit que les gouvernements doivent se suivre et se
ressembler! Suivant l'expression d'un de nos plus spirituels journalistes,
serait-ce bien toujours la meme boutique, et n'y aurait-il de change que
l'enseigne?
_Vendredi 9 decembre_.--A 8 heures du matin, la compagnie des aerostiers
militaires part pour Blois. Nous avons a notre disposition deux fourgons,
ou sont nos ballons, une plate-forme roulante ou se trouve la batterie
a gaz; le zinc en lamelles et les touries d'acide sulfurique. Il
parait qu'on va se battre dans ces parages et que nous pourrons rendre
d'importants services.
Nous arrivons a Blois, dans nos fourgons, car il ne faut plus songer aux
wagons de voyageurs. Du reste, quoique ce mode de locomotion soit peu
confortable, c'est bien la le cadet de nos soucis.
On ne vit plus reellement dans les temps ou nous sommes, les malheurs
s'abattent sur la France avec une telle rapidite, que l'esprit egare,
eperdu, est en proie a un vertige perpetuel qui lui ote toute reflexion.
A Blois, nous trouvons une ville bouleversee. Tout le monde parle de
nouveaux revers, de nouveaux desastres. Dans les rues, on nous apprend que
les Prussiens sont aux portes, nous courons a la prefecture et ces tristes
renseignements se confirment.
Le general P.... fait sauter sous nos yeux le pont de pierre. On nous
apprend ensuite que dans sa precipitation, il a oublie d'envoyer chercher
les approvisionnements de farine qu'on a laisses de l'autre cote du
fleuve. On nous affirme que 10,000 soldats qui s'etaient caches a
Chambord, pour attaquer les Prussiens a l'improviste, ont ete surpris
eux-memes pendant la nuit, que trois batter
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