le telegramme suivant:
"Compagnie des aerostiers est a Rennes attendant vos ordres."
Le soir, a dix heures, on m'apporte une reponse envoyee avec une
exactitude toute militaire.
"Attendez a demain, je vous donnerai des instructions."
Mais de longues journees devaient se passer dans le silence. La deuxieme
armee prenait de nouvelles positions autour de Laval.
_Vendredi 20 janvier_.--Les nouvelles montent encore une fois au beau.
Toutes les troupes regulieres de Rennes sont rappelees a Laval.
La ville offre une physionomie tres-animee, des regiments partent,
d'autres arrivent. Ceux-ci sont les bataillons des mobilises qui se sont
enfuis au Mans; le general Chanzy s'en est debarrasse. Il ne veut plus que
des soldats sur lesquels il puisse compter.
Le bruit court que la deuxieme armee a obtenu quelques avantages.
Quant aux armees du Nord, de l'Est et de Paris, les nouvelles les plus
contradictoires circulent, mais en realite, on ne sait rien.
La compagnie des aerostiers est triste et se plaint de son inactivite
forcee. Elle ne demande qu'a agir. Rennes est une grande ville, monotone
et bigote. On y vend des cierges, des gravures de piete et des coeurs de
Jesus en drap rouge qui arretent les balles prussiennes. Qu'on en vende,
je le concois, mais qu'on les achete comme _pare a balles_, voila ce que
je ne comprends plus.
Nous tuons le temps en faisant de longues promenades aux environs de la
ville. La conversation revient toujours sur Paris! Quel cauchemar
sans treve! Nos yeux se dirigent de ce cote, et malgre nos esperances
passageres, comment ne pas entrevoir l'horrible situation de la France?
Chanzy vient d'etre battu. Les mouvements de Bourbaki sont arretes
dans l'Est. Quel drame nous attend encore? Ce ne peut etre, helas! que
l'agonie. On pense a ses amis de Paris, a leurs souffrances. Comme nous,
ils attendent! s'ils voyaient l'armee de la Loire a cent lieues de leurs
murs, quelle breche dans leur courage si resigne!
_Mardi 24 janvier_.--Les journaux parlent enfin de Paris, ils ont recu des
nouvelles tombees du ciel par ballon monte. Il est question d'une grande
sortie, operee le 19, en avant du Mont-Valerien, mais les resultats ne
sont pas connus. Quelque chose nous dit que le denoument du drame de la
guerre est proche, mais quel supplice que le silence de mort qui regne
autour de nous. On ne sait rien d'officiel, c'est l'incertain qui se
dresse aux yeux de tous, l'inconnu de mauvais augure.
Le s
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