ainsi le peril de la capture, on courait vers d'immenses
et nombreux dangers, comme nous allons essayer de le demontrer.
En effet, rien de plus important en ballon, surtout quand on doit eviter
les surprises d'un ennemi dangereux, que de voir les pays que l'on
parcourt. Avec un peu d'attention, connaissant son point de depart,
suivant sur une bonne carte les cours d'eau, les villes que l'on apercoit
du haut des airs, a la surface du sol, il est possible d'apprecier sa
route. Quand on plane a 1,500 metres de haut, nul projectile n'est a
craindre, et rien n'empeche l'aeronaute, pour plus de securite, de
naviguer a 2,000 metres ou a 3,000 metres au-dessus du niveau des
Prussiens. En partant au lever du jour, il peut donc impunement examiner
l'aspect du sol, voir les ennemis, ou s'assurer de leur absence. Meme en
hiver, il a devant lui de longues heures de jour, comprises entre le lever
et le coucher du soleil, c'est-a-dire au moins 9 heures de voyage. Il
peut avoir la certitude de trouver dans ce laps de temps une terre
hospitaliere.
En partant a minuit, au contraire, on se lance dans les tenebres, a
l'inconnu. Tant que l'obscurite est complete, on n'ose pas descendre, ne
sachant pas ou la brise vous pousse. On attend le lever du jour. Mais le
soleil levant peut vous montrer trop tard, helas! que les courants aeriens
vous ont pousse en mer. C'en est fait alors du navire aerien s'il n'est
sauve par quelque hasard providentiel!
PREMIER DEPART DE NUIT.
27e Ascension. _18 novembre_.--Le _general Uhrich_ (3,000 met.
cub.). Aeronaute: Lemoine, marin.--Passagers: Thomas, proprietaire de
pigeons et deux autres voyageurs.
Depeches: 80 kil. Pigeons: 34.
Depart: gare du Nord, 11h. 15 soir.
Arrivee: Luzarches (Seine-et-Oise), 8h. matin.
Cette premiere ascension nocturne a ete vraiment dramatique; elle a
vivement impressionne les Parisiens, comme l'attestent les quelques lignes
suivantes, que nous empruntons au _Gaulois_ paru le lendemain du depart de
l'aerostat:
"Ceux qui n'ont pas assiste a ce premier depart de nuit ne sauraient
se figurer ce qu'il y a a la fois de triste, d'emouvant, de beau et de
vraiment grand dans ce spectacle que le blocus de Paris nous a valu hier
soir.
"Nous etions la une centaine: des privilegies; car on n'ebruite plus
les departs des ballons-poste comme auparavant. L'ennemi, regulierement
informe quelques heures a l'avance, envoyait depuis quelque temps sur nos
ballons des fusees incendiai
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