n officier francais echappe de
Hombourg, apres avoir ete fait prisonnier a Sedan. Il est arrive a l'armee
de Chanzy en passant par le Luxembourg, la Belgique, Londres et Bordeaux.
On dit ce soir que Paris a capitule. Je ne veux pas croire une telle
nouvelle. Et cependant, cette terrible catastrophe est imminente.
_Lundi 16 janvier_.--Des le matin, mon frere apprend a la gare de Laval
que le materiel de guerre qui s'y trouve va etre evacue sur Rennes. Nos
fourgons de ballons sont accroches a un train. Il faut partir de suite.
Nous montons dans le train, a 10 heures 25, avec Poirrier, Bertaux et nos
marins, campes dans nos fourgons, selon notre habitude. Le train s'arrete
plus d'une heure entre Vitre et Rennes. Le temps se passe dans une petite
auberge de campagne, ou une brave bretonne, coiffee d'un enorme bonnet
blanc, nous sert des crepes de sarrasin et du cafe.
En arrivant a Rennes, a 9 heures, les aerostiers sont l'objet de la plus
vive curiosite. Nos marins, qui nous suivent avec nos bagages, sont
arretes et questionnes par la foule qui leur demande avec anxiete des
nouvelles du Mans.
Les journaux d'ici disent que Chanzy s'est battu avec energie a
Sille-le-Guillaume. Les nouvelles de Bourbaki dans l'Est paraissent
bonnes. Celles de Paris, arrivees par un nouveau ballon, sont favorables.
Fasse le ciel qu'il soit permis d'esperer encore!
On voit passer a Rennes une quarantaine de prisonniers prussiens, dont un
officier, tous beaux hommes et bien equipes.
En approchant de la gare de Rennes, nous avons compte plus de cinq cents
fourgons remplis de vivres destine a l'approvisionnement de Paris. Dans
les circonstances actuelles, ce spectacle n'est-il pas navrant? Quel
abime, helas! separe les Parisiens de ces vivres qu'on a amasses pour eux!
En rentrant ce soir dans les rues de Rennes, je me demandais, avec
mon frere, ou j'etais. Notre vie, depuis quatre mois, est vraiment
extraordinaire. Toujours en mouvement, allant d'emotions en emotions,
c'est un etourdissement, un reve perpetuel.
Impossible de coucher trois jours a la meme place! Quand je me reveille
le matin, je ne sais plus ou je suis! Je cherche des yeux ma chambre de
Paris, mon _at home_, ma bibliotheque, et ne retrouvant rien, la triste
realite se represente a mes yeux.
_Mardi 17 janvier_.--Il pleut toute la journee. Pas un passant dans les
rues de Rennes.
Nous envoyons au general Chanzy, dont le quartier general est decidement a
Laval,
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