; et, qu'enfin je devais sortir de ce couvent
laissant votre cadavre pres de ces deux corps...
Un fremissement agita Pardaillan. Dans son coeur se dechaina la furieuse
envie de sauter sur cette femme, et de lui ecraser la tete comme a une
vipere...
Pendant quelques secondes, Fausta put croire que Pardaillan allait la
tuer... Pourtant, il ne bougeait pas... il ne faisait pas un geste... Sa
figure reprit son apparence d'insouciante audace, et le bon Pardaillan
se mit a rire, s'inclina, et, d'une voix exempte d'amertume, repondit:
--Je suis vraiment au regret, madame, que vos voeux n'aient pas ete
mieux accueillis par le Ciel. Puis-je, avant de nous quitter, vous etre
bon en quoi que ce soit?
Fausta devint bleme. Son orgueil souffrit plus qu'il n'avait jamais
souffert. Elle fut ecrasee par cette generosite simple et souriante, qui
lui apparut comme un prodigieux dedain. Des larmes perlerent a ses cils.
Une force inconnue la poussait vers cet homme qu'elle eut voulu tuer et
qu'elle adorait. Le souvenir de la cathedrale de Chartres passa comme la
foudre dans son esprit... Elle entendit la reponse de Pardaillan:
"J'ai aime... j'aime a jamais la morte... morte au monde, vivante
toujours dans mon coeur! Et vous, je ne vous aime ni jamais ne vous
aimerai..."
Et les paroles qu'elle criait au fond d'elle-meme se figerent sur ses
levres blanches. Elle demeura glacee dans son attitude d'orgueil... Et
la haine, avec la honte de sa defaite, une fois de plus triompha en
elle.
--Monsieur de Pardaillan, dit-elle avec un sourire, j'aurais en effet
un dernier service a vous demander: je crains que le depart des gens de
Sixte ne soit un piege... Sous la garde de votre epee, je ne redouterais
pas une armee. Mais peut-etre ne voudriez-vous pas m'accompagner jusque
dans Paris?...
--Pourquoi non, madame? repondit Pardaillan.
--Merci, monsieur, dit Fausta sans un tressaillement. Veuillez donc
m'attendre devant le portail de cette abbaye. Je vous y rejoindrai dans
quelques instants...
Le chevalier salua en soulevant son chapeau, mais sans s'incliner; puis,
d'un pas tranquille, sans retourner la tete, il s'eloigna et traversa le
terrain de culture.
Alors, Fausta ramena son regard pres d'elle et vit les deux corps
abattus pres de la croix: Farnese et Leonore enlaces dans l'etreinte du
supreme baiser qu'avait cherche l'amant... Un pale sourire vint crisper
ses levres.
"Celui-la, du moins, a recu le chatiment de la trahi
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