alors age de soixante-quatre ans; mais il portait encore la
cuirasse avec une facilite que lui enviaient de plus jeunes.
--Ah! te voila, mon vieux brave! dit Henri III Je craignais que tu ne
fusses pas ici aujourd'hui, car je t'avais donne conge pour huit jours.
--Oui, mais j'ai appris l'arrivee de M. le duc. Peste sire, je n'aurais
eu garde de manquer une si belle occasion de lui presenter mes
respects!... Et sire vous voyez que je suis arrive a temps...
Le roi se mit a rire, les gentilshommes eclaterent.
En effet, a ce moment meme, une rumeur montait de la cour carree:
c'etait un bruit de chevaux qui passaient sous le porche, un cliquetis
d'armes et d'eperons de cavaliers mettant pied a terre... Henri III
palit.
--Comte de Loignes, dit-il d'une voix alteree, voyez donc ce qui se
passe dans la cour.
Il le savait tres bien. Il devinait que c'etait Guise qui arrivait. Et,
avant d'avoir recu aucune reponse il se dirigea vers un grand fauteuil
place sur une estrade et formant trone. Il s'y assit et, d'un geste
rageur enfonca son chapeau sur son front.
--Sire! s'ecria Chalabre qui s'etait precipite a la fenetre en meme
temps que Loignes, c'est M. le duc de Guise, que Dieu le tienne en sa
garde!
--A moins que le diable ne l'emporte! murmura Montsery pres du roi.
--Ah! fit Henri III d'un ton d'indifference si parfaitement jouee qu'il
stupefia sa mere... Tiens! le duc de Guise?... Et que peut-il venir
faire ceans?...
--Nous allons le savoir, sire, car le voici qui monte le grand
escalier...
C'etait vrai. Dans le grand escalier, on entendait la rumeur confuse
d'une foule qui monte. Cette foule, c'etait toute l'escorte du duc qui
l'accompagnait jusqu'a la porte du roi... Il y avait la une menace qui
n'echappa point a Crillon. Arrive devant la porte du salon, il se tourna
vers les gentilshommes guisards et dit:
--Monseigneur, monsieur le duc de Mayenne, monsieur le cardinal, le roi
m'a charge de vous faire savoir qu'il vous accorde audience. Quant a
vous, messieurs, veuillez attendre...
L'escorte demeura donc echelonnee dans l'escalier. Et, comme cet
escalier etait deja occupe par un grand nombre de seigneurs royalistes
et de gens d'armes, il en resulta qu'il se trouva plein de gens qui se
regardaient de travers et qui, sur un mot, se fussent rues les uns sur
les autres.
Crillon avait ouvert la porte, fait entrer messieurs de Lorraine et
soigneusement referme lui-meme la porte.
Les trois freres
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