emieres maisons du village.
Gravelines ne se composait que d'une trentaine de cabanes de pecheurs.
Mais l'entree de ce cheval ramenant un blesse avait attire autour de
Pardaillan quelques bonnes femmes et une bande effaree de marmots.
--L'auberge? demanda Pardaillan.
--Il n'y a pas d'auberge! fit l'une des femmes.
--Qui d'entre vous veut gagner dix ecus? reprit alors Pardaillan.
--Moi, dit la femme qui venait de parler. Si c'est pour loger et soigner
ce cavalier, je m'en charge.
Le blesse fut transporte a quelques pas devant une chaumiere, et couche
sur un matelas de varech.
--Y a-t-il un chirurgien? un medecin? demanda Pardaillan.
--Non, mais nous avons le sorcier. Un vieux qui sait tout, qui guerit
les fievres, et sait soigner les blessures.
A ce moment, celui que, dans le village, on appelait le sorcier, prevenu
sans doute de l'evenement, faisait son entree dans la chaumiere. C'etait
un vieillard a physionomie intelligente, a l'oeil vif et malicieux. Sans
rien dire, il s'agenouilla pres du blesse et defit les bandages, puis se
mit a examiner la plaie.
--Qu'en dites-vous, monsieur? demanda Pardaillan.
--Je dis que c'est fort grave. Mais il en reviendra.
--Ah! fit Pardaillan avec un soupir de soulagement.
Mais aussitot une pensee se fit jour dans sa tete. Si le blesse en
revenait, il irait trouver Farnese, et lui raconterait ce qui s'etait
passe en lui donnant oralement le contenu de la lettre. Alors, tout ce
qu'avait fait Pardaillan devenait inutile! Il attira le sorcier dans un
coin.
--Vous etes sur, fit-il, qu'il en reviendra?
--Tres sur!
--Mais c'est que je voudrais bien que mon ami puisse continuer son
voyage...
Le sorcier secoua la tete:
--S'il bouge de ce matelas avant huit jours, il meurt, dit-il. S'il
essaie de marcher avant un mois, tout sera remis en question. S'il monte
a cheval avant deux mois, je ne reponds de rien!...
Deux mois!...
C'etait plus de temps qu'il n'en fallait a Pardaillan.
Quoi qu'il en soit, le sorcier fit si bien qu'au bout de quatre jours
il put positivement declarer le blesse hors de tout danger. Ces quatre
jours, Pardaillan les avait passes dans la chaumiere. Sur que le comte
Luigi ne mourrait pas et serait convenablement soigne, certain d'autre
part qu'il ne pourrait rejoindre et prevenir Farnese, le chevalier, un
beau matin, fit ses adieux a celui qu'il avait a moitie tue, et reprit
a petites journees le chemin de Paris. Il avait une dou
|