IEN.--Je n'en sais trop rien; il me demandait son _tarke_; il
parait que c'est comme ca qu'il appelle les dindons.
FREDERIC.--Oui, oui; mais qu'a-t-il dit?
JULIEN.--Ma foi, je n'y ai pas compris grand'chose. Il voulait me boxer
et puis ton pere. Il demandait toujours son _tarke_; il m'appelait
voleur, malhonnete. Je crois bien qu'il n'a pas sa tete; il a un peu
l'air d'un fou.
FREDERIC.--A-t-il parle de moi?
JULIEN.--Non, je ne pense pas; mais qu'est-ce que cela te fait?
FREDERIC.--Tu es sur qu'il n'a rien dit de moi?
JULIEN.--Je n'ai rien entendu toujours.
FREDERIC.--Alors je peux rentrer?
JULIEN.--Pourquoi pas? Mais qu'as-tu donc? tu as l'air tout effare.
FREDERIC.--Papa est-il dans la salle?
JULIEN.--Je pense que oui; je ne l'ai pas vu sortir."
Frederic, rassure, sortit de derriere la porte et se dirigea vers la
maison. La porte s'ouvrit et Bonard parut.
"Suis-moi", dit-il a Frederic d'une voix qui reveilla toutes ses
craintes.
"Suis-moi, reprit-il; viens a l'ecurie. Et toi, Julien, va-t'en."
Julien obeit, presque aussi tremblant que Frederic.
Bonard ferma la porte et decrocha le fouet de charretier. Frederic
devint pale comme un mort.
BONARD.--Comment connais-tu cet Anglais qui sort d'ici?"
Frederic ne repondit pas; ses dents claquaient. Bonard lui appliqua sur
les epaules un coup de fouet qui lui fit jeter un cri aigu.
BONARD.--D'ou connais-tu cet Anglais?
FREDERIC, _pleurant_.--Je l'ai... rencontre... avec Alcide.
BONARD.--Pourquoi etais-tu avec Alcide, malgre ma defense? Pourquoi,
d'accord avec Alcide, as-tu vole mes dindons pour les vendre a cet
Anglais? Pourquoi m'as-tu laisse deux fois gronder Julien, le sachant
innocent et te sentant coupable?
FREDERIC, _pleurant_.--Ce n'est... pas moi... mon pere,... c'est...
Alcide."
Puis, se jetant a genoux devant son pere, il lui dit en sanglotant: "Mon
pere, pardonnez-moi, c'est Alcide qui a vole les dindons. J'ai seulement
eu tort de le voir apres que vous me l'avez defendu.
BONARD.--Tu mens. Je sais tout; avoue ta faute franchement. Raconte
comment la chose est arrivee, et comment Alcide a pu vendre mes dindons
a l'Anglais.
FREDERIC.--Alcide etait convenu de me rencontrer dans le petit bois le
soir quand je serais seul; il m'attendait. J'ai envoye Julien les deux
fois me faire une commission, pour qu'il ne me vit pas avec Alcide: j'ai
couru dans le bois; je l'ai trouve avec l'Anglais; puis Alcide a disparu
un insta
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