donner
beaucoup a toi. Tenez, petite, voila."
M. Georgey tira sa bourse de sa poche.
M. GEORGEY.--Tu voyais! Il etait pleine d'argent jaune. Moi te donner
cinq jaunets. C'etait bien beaucoup; c'etait une grosse argent."
Et il les mit de force dans la main de Julien. Mme Bonard poussa un cri;
Julien lui dit:
"Qu'avez-vous, maitresse? De quoi avez-vous peur?
MADAME BONARD, _tristement_.--Tu vas me quitter, mon Julien!
Moi-meme, je dois te conseiller de suivre un maitre si genereux!
M. GEORGEY.--Bravo! Madame Bonarde, c'etait beaucoup fort bien! Viens,
petite Juliene, moi riche, moi te donner toujours les jaunets.
JULIEN.--Merci bien, Monsieur, merci, je suis tres reconnaissant. Voici
vos belles pieces, Monsieur, je n'en ai pas besoin: je reste chez M. et
Mme Bonard; j'y suis tres heureux et je les aime."
Julien tendit les cinq pieces de vingt francs a M. Georgey, qui ouvrit
la bouche et les yeux, et qui resta immobile.
MADAME BONARD.--Julien, mon garcon, que fais-tu? tu refuses une fortune,
un avenir!
M. GEORGEY.--Juliene, tu perdais le sentiment, _my dear_. Pour
quelle chose tu aimais tant master et Mme Bonarde?
JULIEN.--Parce qu'ils m'ont recueilli quand j'etais orphelin, Monsieur;
parce qu'ils ont ete tres bons pour moi depuis plus d'un an, et que je
suis reconnaissant de leur bonte. Ne dites pas, ma chere maitresse, que
je refuse le bonheur, la fortune. Mon bonheur est de vous temoigner
ma reconnaissance, de vous servir de mon mieux, de vivre pres de vous
toujours.
--Cher enfant! s'ecria Mme Bonard, je te remercie et je t'aime, ce que
tu fais est beau, tres beau."
Mme Bonard embrassa Julien, qui pleura de joie et d'emotion; Caroline se
mit aussi a embrasser Julien; l'Anglais sanglota et se jeta au cou de
Julien en criant:
"_Beautiful! Beautiful!_ Petite Juliene, il etait une grande
homme!"
Et, lui prenant la main, il la serra et la secoua a lui demancher
l'epaule. Julien lui coula dans la main ses pieces d'or, l'Anglais
voulut en vain le forcer a les accepter. Julien s'enfuit et retourna a
son troupeau, qui s'etait eparpille dans le champ pendant cette longue
scene. Il courait de tous cotes pour les rassembler; Caroline et Mme
Bonard coururent aussi pour lui venir en aide: l'Anglais se mit de la
partie et parvint a saisir deux des plus belles dindes; il les examina,
les trouva grosses et grasses, leur serra le cou et les etouffa.
M. GEORGEY.--Caroline. Caroline, j'avais les _turke
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