tu prendrais du mal; l'appetit te
viendra en mangeant."
Frederic, oblige de ceder, suivit sa mere et trouva Julien qui balayait
la salle et rangeait tout. Ils se regarderent tous deux avec mefiance.
Frederic craignait que Julien n'eut devine quelque chose; Julien avait
reellement des soupcons, qu'il ne voulait pas laisser paraitre.
Frederic finissait sa soupe quand M. Georgey parut. Julien courut a lui.
"Je suis content de vous voir, Monsieur. Hier soir, en me deshabillant,
j'ai trouve beaucoup de pieces d'or dans la poche de mon habit: elles ne
sont pas a moi. Elles doivent etre a vous; j'etais tout pres de vous,
je pense que vous vous etes trompe de poche; au lieu de mettre dans la
votre, vous avez mis dans la mienne.
M. GEORGEY.--No, no, je n'avais mis rien; je n'avais touche rien. Je
avais dormi comme toi, povre petite Juliene. Je comprenais, je savais.
C'etait le malhonnete, les coquines Alcide, Fridric; ils avaient vole
moi et mis une petite somme dans le gilet de toi, pour dire: C'etait
Juliene le voleur de Georgey."
Mme Bonard ne pouvait en croire ses oreilles; elle tremblait de tout son
corps.
M. GEORGEY.--Ou Master Bonard? Je avais a dire un terrible histoire
a lui et a povre Madme Bonarde... Ah! le voila Master Bonard. Venez
vitement. Je avais a dire a vous votre Fridric il etait un voleur
horrible; Alcide une coquine davantage horrible, abominable."
Bonard, qui venait d'entrer, devint aussi tremblant que sa femme;
Frederic, ne pouvant s'echapper, etait tombe a genoux au milieu de la
salle. Julien etait consterne. Personne ne parlait.
M. Georgey raconta de son mieux ce qui lui etait arrive depuis qu'ils
avaient rencontre Alcide et Frederic. Il dit comment il avait trouve sa
poche videe en rentrant chez lui; comment il etait retourne a la ville
pour porter plainte; qu'en cherchant Alcide et Frederic, il avait ete
encore vole par deux jeunes gens qu'on avait arretes, et sur lesquels on
avait trouve sa montre, sa bourse et une autre montre dont les gendarmes
cherchaient le proprietaire, et qui etait celle qu'Alcide et Frederic
venaient d'acheter.
Il parla avec emotion de sa douloureuse surprise quand il avait vu
Frederic amene par des gendarmes en compagnie d'Alcide; quand il avait
vu Frederic ayant dans sa poche une chaine d'or et des guinees qui
etaient precisement celles qu'on lui avait volees a lui Georgey.
Il raconta sa genereuse resolution de sauver l'honneur de ses amis
Bonard. Il a
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