conformement a l'article *** du code penal militaire, vous condamne a
la degradation suivie de la peine de mort."
Un silence solennel suivit la lecture de cette sentence. Il fut
interrompu par Alcide, qui s'ecria, en montrant le poing au tribunal:
"Canailles! je n'ai plus rien a menager; je puis vous dire a tous que je
vous hais, que je vous meprise, que vous etes un tas de gueux...
--Qu'on l'emmene, dit le colonel. Condamne, vous avez trois jours pour
l'appel en revision ou pour implorer la clemence imperiale.
ALCIDE, _vociferant_.--Je ne veux en appeler a personne; je veux
mourir; j'aime mieux la mort que la vie que je menerais dans vos bagnes
ou dans vos compagnies disciplinaires."
En disant ces mots, Alcide s'elanca sur le marechal des logis, et, avant
que celui-ci ait pu se reconnaitre, il le terrassa en lui assenant des
coups de poing sur le visage. Les gendarmes se precipiterent sur Alcide
et releverent le marechal des logis couvert de sang. Quand le tumulte
cause par cette scene fut calme, on fit sortir Alcide. Le colonel
ordonna qu'il fut mis aux fers.
Les officiers qui composaient le tribunal allerent tous savoir des
nouvelles de Frederic. La scene qui suivit fut touchante: Frederic, hors
de lui, ne savait comment exprimer sa vive reconnaissance.
LE COLONEL.--Remets-toi, mon brave garcon, remets-toi; nous avons fait
notre devoir; il faut que tu fasses le tien maintenant. Bientot, sous
peu de jours peut-etre, nous aurons un corps d'Arabes sur les bras.
Bats-toi comme tu l'as fait jusqu'ici; gagne tes galons de brigadier,
puis de marechal des logis, en attendant l'epaulette et la croix."
Tout le monde se retira, laissant avec Frederic M. Georgey, qui avait
recu force compliments, et qui put se dire qu'il avait contribue a
l'acquittement de son protege.
Quand M. Georgey et Frederic apprirent la nouvelle violence d'Alcide, le
premier se frotta les mains en disant:
"Je savais. C'etait une hanimal feroce, horrible. Lui tue par une
fusillement; c'etait tres bon."
Frederic, inquiet de son marechal des logis, alla savoir de ses
nouvelles; il le trouva revenu de son etourdissement et soulage par
la quantite de sang qu'il avait perdu par suite des coups de poing
d'Alcide.
Pendant que Frederic etait au cachot, il avait a peine touche aux
provisions de M. Georgey; il proposa a sa chambree de s'en regaler au
repas du soir.
"Mais pas de vin, dit-il, un petit verre en finissant voila tout. J'ai
ju
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