ir par rapport a ses
parents, sa rancune, haineuse par moments, contre Alcide, auteur de tous
ses maux. Le bon pretre le consola, le remonta et le laissa dans une
disposition d'esprit bien plus douce, plus resignee. Quant a Alcide, il
conserva tous ses mauvais sentiments.
"Je n'ai qu'un regret, disait-il, c'est que Frederic n'ait pas donne
une rossee soignee a ce brigand de marechal des logis; il eut ete
certainement condamne a mort comme moi, ce qui reste incertain pour lui,
puisqu'il a seulement lutte contre ce gueux."
XXV
VISITE AGREABLE
Huit ou dix jours apres cet evenement, le colonel, seul dans sa chambre,
lisait attentivement les interrogatoires des accuses et toutes les
pieces du proces. Il vit avec surprise qu'Alcide accusait Frederic
de deux vols graves commis au prejudice de M. Georgey et d'un pauvre
orphelin recu par charite chez Bonard pere. Il lut avec un chagrin reel
le demi-aveu de Frederic, qui en rejetait la faute sur Alcide. Il ne
pouvait comprendre que ces vols n'eussent pas ete poursuivis par les
tribunaux; il comprenait bien moins encore qu'un garcon capable de deux
actions aussi laches que criminelles fut devenu ce qu'etait Frederic
depuis son entree au regiment, l'exemple de tous ses camarades.
"Comment Georgey a-t-il pu s'attacher a un voleur et me le recommander
en termes aussi vifs et aussi affectueux?"
Pendant qu'il se livrait a ces reflexions, il entendit un debat a la
porte d'entree entre sa sentinelle et une personne qui voulait penetrer
de force dans la maison. Il ecouta...
"Dieu me pardonne, s'ecria-t-il, c'est Georgey! Je reconnais son accent.
Il veut forcer la consigne. Il faut que j'y aille, car ma sentinelle
serait capable de lui passer sa baionnette au travers du corps pour
maintenir la consigne."
Le colonel se leva precipitamment, ouvrit la porte et descendit. M.
Georgey voulait entrer de force, et la sentinelle lui presentait la
pointe de la baionnette au moment ou le colonel parut.
"Georgey!... s'ecria-t-il. Sentinelle, laisse passer."
Le soldat releva son fusil et presenta arme.
LE COLONEL.--Entrez, entrez, mon ami.
M. GEORGEY.--Une minoute, s'il vous plaisait. Soldat, vous avoir bien
fait; moi j'etais une imbecile, et vous etais bon soldat francais.
Voila. Et voila un petit recompense."
M. Georgey lui presenta une piece de vingt francs. Le soldat ne bougea
pas; il restait au port d'armes.
M. GEORGEY.--Quoi vous avez, soldat francais. Pourqu
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