te sur un
piedestal, elle eut ete declassee. De la une vie malheureuse pour elle
aussi bien que pour son mari, car elle n'eut pas pu donner a celui-ci
les joies de la famille, du menage, du pot-au-feu.
Le colonel ecoutait ces felicitations avec ennui; car, apres la nuit
qu'il venait de passer, il n'etait pas dispose a la patience. Mais le
baron etait un homme qui ne se laissait pas demonter, quand il avait
enfourche un dada.
Il tenait a prouver que Carmelita n'etait qu'une belle statue, bonne a
parer de bijoux et de pierreries, qui donnerait a son mari toutes les
satisfactions de la vanite mondaine, sans rien autre chose, et il
poursuivait sa demonstration assez habilement, sans rien dire de
blessant, au moins d'une facon directe.
Mais il n'etait pas venu seulement pour feliciter le colonel a propos de
son mariage, il voulait encore le prier a diner pour le lundi suivant:
il s'agissait de feter son propre anniversaire, et la fete ne serait
pas reussie, si le colonel, si ce brave colonel, si ce cher ami,
ne l'honorait pas de sa presence. Il etait venu pour la fille, ne
viendrait-il pas pour le pere? Et puis, au moment de ce mariage, il
fallait resserrer leurs relations, afin qu'elles se continuassent apres
d'une facon suivie et intime, il ne serait pas mauvais pour Carmelita de
voir souvent Ida, qui serait quelquefois de bon conseil et qui en tout
cas, par sa simplicite, serait de bon exemple.
Si le baron etait un homme qu'il fallait ecouter quand meme, c'etait
aussi un homme qu'on ne pouvait pas refuser.
Le colonel dut, de guerre lasse, accepter cette invitation a diner.
Et le baron s'en alla, satisfait, continuer ses felicitations aupres du
prince Mazzazoli.
En agissant ainsi, il n'avait pas de but determine et ne savait pas trop
ce qu'il cherchait; mais il cherchait, ce qui etait quelque chose.
Il cherchait, il guettait.
En regardant, en ecoutant, en apostant des gens habiles dans l'art de
regarder et d'ecouter, il devait bien, pendant ces trois semaines,
decouvrir un indice sur lequel il pourrait batir son plan d'attaque. Si
le prince possedait une grande finesse, Carmelita etait assez naive, la
comtesse n'etait pas tres-forte, et le colonel etait assez ouvert pour
ne rien cacher.
La premiere chose a faire, c'etait d'etre pres d'eux, pret a profiter
des occasions qui se presenteraient ou qu'on provoquerait, si elles
tardaient trop a naitre spontanement.
Bientot le baron arriva aux Champs-Elys
|