ecoulaient de la legislation civile recemment mise en vigueur; mais ils
estimerent que le mariage avait toutes chances d'etre reconnu valable par
les tribunaux, partant la naissance d'etre proclamee legitime.
Sur ces entrefaites, Maurice, informe du voyage de sa mere, prit la petite
Aurore dans ses bras et chargea la portiere de monter avec l'enfant chez
madame Dupin, en lui disant: "Voyez donc, madame, la jolie petite fille
dont je suis grand'mere! Sa nourrice me l'a apportee aujourd'hui, et j'en
suis si heureuse que je ne peux pas m'en separer un instant." Tout en
bavardant, elle deposa le bebe sur les genoux de la vieille dame qui
cherchait sa bonbonniere. Soudain un soupcon traversa l'esprit de madame
Dupin. Elle s'ecria: "Vous me trompez, cette enfant n'est pas a vous; ce
n'est pas a vous qu'elle ressemble... Je sais, je sais ce que c'est." Et
elle repoussait la petite Aurore qui, effrayee, se mit a verser des
larmes. La portiere s'appretait a reprendre et a emporter l'enfant. La
grand'mere fut vaincue. Lorsqu'elle sut que son fils etait en bas, elle le
fit appeler. C'etait le pardon. Quand ils se retirerent, Aurore avait dans
la main une bague de rubis que madame Dupin envoyait a sa belle-fille:
George Sand a toujours porte cette bague. Quelques semaines plus tard, la
reconciliation fut complete. La chatelaine de Nohant consentit a recevoir
l'humble modiste qui s'etait introduite dans la famille; elle assista au
mariage religieux, ainsi qu'au repas qui suivit. Aussitot apres, elle
regagna son manoir berrichon.
Le jeune menage s'etait installe dans un etroit appartement de la rue
Grange Bateliere. Bientot Maurice fut oblige de rejoindre son regiment
pour la campagne d'Ulm, et sa femme demeura a Paris avec ses deux enfants,
la petite Aurore et son ainee Caroline, qui n'etait pas la fille de
Maurice Dupin. Le train de vie etait des plus modestes, l'existence des
plus regulieres. Celle qui jadis avait suivi un general sur les grandes
routes de l'Italie, n'aspirait desormais qu'a la quietude. Elle n'avait
aucun gout pour le monde. "Les grands diners, ecrit George Sand, les
longues soirees, les visites banales, le bal meme, lui etaient odieux.
C'etait la femme du coin du feu ou de la promenade rapide et folatre." En
ce point, ses sentiments etaient tout a fait conformes a ceux de son mari.
"Ils ne se trouvaient heureux, ajoute l'_Histoire de ma Vie_, que dans
leur petit menage. Partout ailleurs ils etouffaient de melan
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