nt devint odieux a Aurore. Il y avait un lien
d'affection, ou brise ou detendu, entre elle et sa grand'mere. Elle se
comporta en enfant terrible, rebelle au travail, s'evadant de la maison
pour courir les chemins, les buissons, les pacages, et ne revenir qu'a
nuit close avec des vetements dechires. Madame Dupin decida de la mettre
au couvent a Paris. Aurore accueillit avec joie cette nouvelle; du moins
elle verrait sa mere.
Au debut de l'hiver 1817-1818, madame Dupin conduisit sa petite-fille,
alors dans sa quatorzieme annee, au couvent des Anglaises, institue par la
veuve de Charles Ier pour les religieuses catholiques emigrees sous le
protectorat de Cromwell. George Sand devait y passer trois ans, jusqu'au
printemps de 1820. Elle a raconte avec d'amples details son sejour dans
cette communaute, ou les eleves, assez indisciplinees, semble-t-il, se
divisaient en trois categories: les _diables_, les _sages_ et les
_betes_. Ces dernieres, il va sans dire, etaient les plus nombreuses, et
l'_Histoire de ma Vie_ relate avec une complaisante prolixite maintes
anecdotes de couvent qui ne sauraient nous inspirer le meme interet qu'a
madame Sand, lorsqu'elle se retournait vers les annees de pension ou son
esprit recut la profonde commotion du mysticisme.
La communaute des Anglaises consistait en "un assemblage de constructions,
de cours et de jardins qui en faisait une sorte de village plutot qu'une
maison particuliere." C'etait un dedale de couloirs, d'escaliers, de
galeries, d'ouvertures, de paliers; des chambres qui ouvraient a la file
sur des corridors interminables, et puis, ajoute George Sand, "de ces
recoins sans nom ou les vieilles filles, et les nonnes surtout, entassent
mysterieusement une foule d'objets fort etonnes de se trouver ensemble,
des debris d'ornements d'eglise avec des oignons, des chaises brisees avec
des bouteilles vides, des cloches felees avec des guenilles, etc., etc."
Des salles d'etude, et particulierement de la petite classe ou etaient
entassees une trentaine de fillettes, George Sand a garde un deplaisant
souvenir. Elle revoit et nous montre "les murs revetus d'un vilain papier
jaune d'oeuf, le plafond sale et degrade, des bancs, des tables et des
tabourets malpropres, un vilain poele qui fumait, une odeur de poulailler
melee a celle du charbon, un vilain crucifix de platre, un plancher tout
brise; c'etait la que nous devions passer les deux tiers de la journee,
les trois quarts en hiver." Et de
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